avoir pour prologue l’avènement d’un pape transformé par l’opinion en initiateur, et que tout cela allait passer comme un rêve. Ce mouvement, il l’avait préparé ; il le servit du conseil et de l’épée au jour de l’action, il en sauva l’honneur et la dernière espérance dans le naufrage. Ramené à Rome aux premiers temps du règne de Pie IX, il campait là en quelque sorte au centre de cette Italie frémissante de 1847. C’est de Rome que partait le signal, le reste l’inquiétait peu ; il ne donnait pas trois mois aux autres princes italiens « pour se mettre au pas. » Le Piémont l’inquiétait encore moins avec sa lenteur à se mettre en mouvement. « Je pense, dit-il, que c’est affaire de calcul et de préparation. Le roi veut prendre son moment, et une fois lancé il ne reculera pas. » L’essentiel pour lui était donc Rome, où un pape séduit, entraîné, poussé, prenant pour une initiative ce qui.lui était imposé chaque jour par les événemens, se faisait l’inaugurateur d’une politique nouvelle dont il ne soupçonnait pas lui-même la portée.
Sans être Romain, comme Italien, Massimo d’Azeglio devenait un conseil pour tous, un guide qui portait le drapeau, et qui commençait par le programme pour l’opinion nationale cette série de brochures fines, chaleureuses, sensées, où se retrouve tout le sel de la révolution italienne. Les libéraux de Rome voyaient en lui un chef ; le pape lui-même le voyait avec plaisir. Il y a deux traits que je veux noter. D’Azeglio ne se dissimulait pas ce qu’il y avait de confus, d’exubérant, d’un peu étourdissant quelquefois dans cette agitation dont s’enivrait l’Italie, et il ne ménageait à ses compatriotes ni la sévérité ni les conseils ; mais en même temps, par une généreuse susceptibilité, il défendait ce mouvement contre les politiques du dehors qui ne voyaient que le ridicule et tournaient tout en raillerie. Il écrivait à ses amis de France : « Si on voyait un homme qu’on aurait roué de coups, affaibli et garrotté pour le voler, et qui, réussissant à recouvrer l’usage d’un bras, tenterait quelque chose pour sa délivrance, il y aurait sans doute de la gaucherie dans ses efforts ; mais serait-ce drôle, et des gens de cœur pourraient-ils s’en amuser ? Au reste, considérant que la race humaine n’est pas généreuse, ce sera à nous de faire en sorte qu’on nous prenne au sérieux, — et patience ! » Autre trait : d’Azeglio fut évidemment de ceux qui eurent l’illusion de Pie IX, d’une papauté rajeunie et transformée. Il faut s’entendre cependant ; ce n’était pas chez lui une illusion sans conditions. « Si Pie IX veut, dit-il dès ce moment dans sa correspondance, s’il consent à être ce que l’opinion fait de lui, la papauté est définitivement la force dirigeante… S’il s’y refuse, je ne sais ce qui arrivera… La Providence n’offre pas deux fois une occasion telle que celle-ci… » En d’autres termes,