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surcharger les cartes et les globes de toutes ces petites étoiles, elles ne laissent pas d’être fort utiles dans la pratique de l’astronomie. » Il détermina ainsi les positions de 9,800 étoiles.

Pendant le cours de ce travail, l’infatigable abbé trouva encore le temps de fixer d’une manière précise la latitude et la longitude du Cap et d’observer le soleil et la lune, ainsi que les planètes Vénus et Mars ; ses mesures, combinées avec celles que Lalande et d’autres faisaient à la même époque en Europe, devaient donner une valeur exacte de la distance de ces astres. Après avoir achevé ces travaux d’observatoire, Lacaille avait encore cinq ou six mois devant lui en attendant le moment du retour des vaisseaux en Europe. La protection inespérée que lui avaient value ses lettres de recommandation pour le gouverneur, les grandes facilités qu’il rencontrait partout, lui inspirèrent l’idée de mesurer un degré du méridien. Cette opération promettait un résultat intéressant : elle devait faire connaître la figure de la partie australe de la terre et décider si l’hémisphère sud était l’exacte image de l’hémisphère nord. Lacaille résolut donc d’exécuter la triangulation du Cap, sans s’effrayer des obstacles que ce projet devait rencontrer dans un pays presque entièrement désert, sans eau et couvert de broussailles. Grâce au dévouement de son hôte, ce brave Allemand chez qui il demeurait, l’entreprise fut menée abonne fin.

On appelle triangulation un procédé d’arpentage en grand, par lequel on arrive à déterminer les positions d’une série de points au moyen d’une chaîne de triangles dont ces points forment les sommets. Pour bien comprendre cette opération, réduisons-la d’abord à sa plus simple expression. Je suppose que l’on connaisse déjà la situation relative et la distance de l’arc de triomphe de l’Étoile et du Panthéon, et qu’il s’agisse de trouver la position d’un signal érigé sur la butte Montmartre. On dressera d’abord sur la plateforme du Panthéon un instrument propre à la mesure des angles, par exemple une lunette mobile sur un cercle divisé ; on visera successivement l’arc de triomphe et le signal de Montmartre, et l’on aura l’angle que forment entre elles les deux directions. Ensuite on ira répéter la même opération sur l’arc de triomphe : on y mesurera l’angle que forme la direction du signal avec celle du Panthéon. De cette façon, on aura déterminé la figure du triangle formé par les trois points en question, et l’on pourra le tracer sur le papier à une échelle réduite. On y marquera d’abord dans leur position relative les deux points qui représenteront l’arc de triomphe et le Panthéon ; on les joindra par une ligne droite : ce sera la base du triangle. Ensuite, connaissant les angles que doivent former avec cette base les deux autres côtés, qui sont les directions