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promoteur, plus il est exigeant à l’égard des soldats qu’il veut enrôler sous ses drapeaux pour les appeler à l’état-major du travail ; il ne leur dissimule pas les rudes étapes qu’ils auront à franchir, les épreuves et les déboires qui les attendent sur le chemin de la terre promise, les efforts d’amélioration morale et intellectuelle dont la victoire doit être le prix. Philosophe, moraliste et économiste tout ensemble, M. Jules Simon a dégagé la coopération de ses affinités compromettantes avec l’esprit de secte. Cela ne suffit point pour démontrer l’efficacité pratique du système, mais du moins on n’a plus devant soi l’ingrate négation des principes que la science a si laborieusement fondés.

A ces principes, M. Jules Simon vient apporter un puissant renfort en proclamant, dans un livre qui est lu par le peuple, l’impérieuse nécessité de l’instruction populaire, en consacrant tout un chapitre à décrire les rapports étroits qui unissent la science et la main-d’œuvre. A l’en croire, il existerait encore des ennemis de la démocratie pour dire avec terreur : Si jamais le peuple sait lire !… Personne, que nous sachions, ne dit cela. Tout le monde au contraire pense que l’instruction est le premier bien, non-seulement pour l’individu mais encore pour la société, qu’en présence du suffrage universel elle est indispensable pour chaque citoyen, que dans la mêlée quelque peu confuse où s’agitent les problèmes économiques elle seule est capable de garantir la paix du travail, soit en favorisant le développement de l’industrie et en multipliant ainsi l’utile emploi des bras, soit en préservant l’ouvrier des entraînemens et des illusions qui l’égareraient sur l’étendue de ses droits. C’est au peuple qu’il faut dire et répéter à satiété. Instruisez-vous ; et quand cette opinion est générale, quand ce désir est universel, il n’est pas juste qu’un parti semble s’attribuer, le mérite exclusif d’un conseil aussi simple. Le conseil et l’action partent de tous côtés, sans distinction de partis politiques, et l’on pourra dire un jour de notre siècle, comme l’espère M. Jules Simon, qu’il a été le siècle des écoles.

En résumé, modification de certaines lois spéciales, droit.de réunion et d’association, extension du régime coopératif, développement de l’instruction populaire, tels sont les remèdes qui sont réclamés en vue de supprimer les inégalités sociales dont souffrent les populations ouvrières et pour émanciper définitivement le travail, remèdes qui rendraient inutile le rôle de l’assistance privée. Nous avons exprimé en peu de mots notre avis sur ces divers points. Partout où il y a une inégalité à faire disparaître, une liberté à revendiquer, la discussion théorique est vraiment superflue. Tout le monde est d’accord, et il ne reste plus qu’à rappeler au législateur