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voisins de la chaîne des Vosges. Situé en face d’elle, la Schwarzwald ou Forêt-Noire recèle aussi des traces d’anciens glaciers, mais moins évidentes que celles que nous venons d’indiquer.

La chaîne du Jura, dont les points les plus élevés, le Chasseral, la Dôle, le Grand-Colombier de Gex et le Reculet, sont compris entre 1,617 et 1,720 mètres, a eu ses propres glaciers pendant la période de froid. Les traces en sont peu visibles, et cela pour deux raisons bien simples. 1° Le Jura ayant été envahi par les immenses glaciers du Rhône et de l’Isère, ceux-ci ont laissé leur empreinte à la surface du sol, et le géologue est embarrassé pour distinguer la roche polie et striée par le glacier alpin de celle qui le serait par un petit glacier jurassique ; 2° la chaîne est entièrement calcaire : il en résulte que les blocs et les cailloux glaciaires le sont aussi, et la nature de la roche en place est souvent identique à celle des matériaux erratiques qu’elle supporte. Dans les Alpes, les Pyrénées et les Vosges, il en est rarement ainsi. Les moraines, composées de roches cristallines, reposent sur des schistes, des calcaires, du terrain crétacé ou de la molasse, et le contraste de ces roches disparates facilite singulièrement le diagnostic des moraines, qui se distinguent à première vue des éboulemens et des autres accumulations de terrain de transport avec lesquels on pourrait les confondre.


VII. — ANCIENS GLACIERS DES AUTRES CHAINES DE MONTAGNES.

C’est en vain que de savans géologues ont cherché les traces d’anciens glaciers dans les montagnes de l’Auvergne et dans celles des Cévennes. Peut-être ces chaînes n’en ont-elles jamais recelé à cause de leur situation plus méridionale et du peu d’élévation qu’elles présentent. Cependant en Auvergne le Puy de Sancy a 1,886 mètres d’altitude, le Plomb du Cantal 1,856. Dans les Cévennes et la Lozère, le Crucinas s’élève à 1,718 mètres, le mont Lozère à 1,690 et l’Aigoual à 1,564 mètres ; mais dans les deux pays le granite, qui fournit partout les blocs erratiques les plus volumineux et les plus durables, se décompose si facilement que, si jamais des blocs de cette roche ont été transportés par d’anciens glaciers, ils se sont désagrégés et ont disparu depuis longtemps. En Auvergne, un autre phénomène, probablement postérieur à l’extension des glaciers, les éruptions des pays volcaniques vomissant des cendres, des rapilli et des bombes, les coulées de laves épanchées dans les vallées ont détruit et masqué le phénomène erratique.

Toutes les parties du globe étudiées sous ce point de vue offrent des preuves de l’ancienne extension des glaciers dans les montagnes