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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 janvier 1867.

il y a sans doute, pour les peuples et pour les hommes unis par le cœur et par la pensée à leurs fortunes politiques, des temps d’épreuves douloureuses et de cruels soucis ; il est des momens où sous le contre-coup de fautes funestes, de surprises désolantes, d’événemens qui déterminent des situations nouvelles et rendent nécessaires des changemens immédiats de résolution et d’action, la raison et les sentimens du patriote sont en proie à de véritables angoisses. On ressent les maux du présent, on pressent ceux de l’avenir, on hésite avec un tremblement intérieur sur les moyens à choisir pour réparer les uns et prévenir les autres. Il est certain que la France est dans une de ces crises. Elle vient de faire des expériences qui l’ont plongée dans un étonnement profond ; elle comprend sourdement que ces expériences contiennent des enseignemens qu’on doit mettre le plus promptement possible à profit, si l’on ne veut point se laisser précipiter à des déchéances irréparables. Il faudrait plaindre également dans cette grave conjoncture et ceux qui par un fatalisme indolent et frivole se détourneraient de l’étude des problèmes qui viennent de se poser avec une soudaineté si dramatique, et ceux qui, ne voulant pas pénétrer le vrai sens des leçons qui nous ont été données, chercheraient des retours de fortune dans la continuation obstinée des erremens qui nous ont conduits où nous sommes. Qu’on en soit sûr, ni la sceptique insouciance des uns, ni l’aveugle entêtement des autres ne pourront donner à la France la robuste sécurité qui lui est nécessaire pour aborder les nouvelles routes d’action où elle est poussée par la force des choses. Ceux-là seuls qui sauront lire avec décision "dans les résultats réels des dernières expériences, ceux qui auront la franchise de s’en avouer le sens, ceux qui reconnaîtront et confesseront avec courage le devoir des réformes seront aussi les seuls qui nourriront en eux-mêmes et répandront autour d’eux une saine, énergique et invincible