français, l’italien, l’espagnol, entre lesquels cette double analogie se remarque, et qui tous trois aussi présentent à la fois des divergences dans les racines et dans les terminaisons des mots.
La comparaison portant sur ces deux élémens conduit à la formation des familles naturelles de langues. Ces familles sont elles-mêmes de plusieurs degrés, comme les espèces et les genres dans l’histoire naturelle. Ainsi le français, l’espagnol, l’italien, le roumain, langues vivantes, composent un groupe naturel qui, dans son ensemble, se rapporte au latin. Pareillement les idiomes vivans de l’Angleterre, de l’Allemagne, de la Suède, de la Norvège et plusieurs autres se rangent côte à côte dans un même groupe sous le nom général de langues teutoniques. Il en est de même pour les idiomes modernes dérivés du celte, du grec, de l’ancien perse et du sanscrit ; mais, comparés entre eux, le celte, l’ancien allemand, le latin, le grec, le perse et le sanscrit, à cause des ressemblances qu’ont entre elles les grammaires et surtout les racines, se classent tous ensemble dans un groupe supérieur auquel on a donné le nom général de famille aryenne. Tout cet ensemble systématique repose sur le principe solide des ressemblances et des différences reconnues par des analyses scientifiques. Le même principe qui conduit à former des familles naturelles conduit également à les séparer. En effet, quand deux langues ne présentent entre elles aucune analogie ni dans les racines ni dans les formes grammaticales, elles demeurent nécessairement séparées dans l’ensemble de la classification. Elles doivent dès lors être considérées comme irréductibles l’une à l’autre. M. Müller croit que cette séparation ne doit pas être considérée comme absolue, parce que les langues, dit-il, sont soumises à des altérations qui ont pu avec le temps faire disparaître entre elles toute ressemblance. Il faut observer cependant que, si ce doute était admis dans la science, il serait le renversement absolu de la méthode, car il reviendrait à dire que les langues doivent être rapprochées d’après les ressemblances et séparées d’après les dissemblances qu’elles présentent, mais que ces dissemblances après tout peuvent bien n’être qu’une illusion et un effet du temps. Il faut pourtant suivre une méthode et y être fidèle, quand on sait qu’elle est bonne. Nous devons donc maintenir que deux langues ou deux familles de langues qui n’ont entre elles aucun élément commun sont irréductibles l’une à l’autre. Il faut même aller plus loin et dire que la présence de part et d’autre de quelques racines semblables ne porte pas atteinte à cette indépendance réciproque, car le nombre des monosyllabes possibles est loin d’être infini ; les idées primordiales qu’ils expriment sont en nombre très borné et il est presque inadmissible que de telles rencontres ne se soient pas