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même fixer d’une manière approximative la profondeur du point initial de l’ébranlement; mais quant à la cause du phénomène, elle n’en reste pas moins le plus souvent inconnue. On ne sait point non plus si toutes les fortes vibrations du sol sont en réalité, ainsi que la plupart des géologues l’admettaient jusqu’à présent, des faits d’origine volcanique; on se demande, sans pouvoir toujours répondre à cette question, si elles ne sont que des tentatives avortées d’une explosion de matières incandescentes, ou bien si elles proviennent de causes complètement différentes de celles qui soulèvent les cônes des volcans et percent les cratères. Cette dernière opinion a trouvé dans plusieurs savans de passionnés défenseurs. Parmi les géologues qui nient la connexité des tremblemens de terre et des phénomènes volcaniques et qui rompent ainsi hardiment avec les hypothèses placées sous le grand patronage des noms de Humboldt, de Léopold de Buch, d’Élie de Beaumont, se distingue surtout M. Otto Volger. Les lecteurs de ses ouvrages ne peuvent s’empêcher d’être saisis par l’argumentation nourrie de faits que l’auteur dirige contre des théories naguère presque universellement acceptées.

Toutefois il est un certain nombre de tremblemens de terre dont l’origine volcanique peut être directement constatée, indépendamment de toute théorie. Ainsi lorsque les flancs d’une montagne fumante comme l’Etna ou le Kilauea se crevassent soudain pour laisser passer un fleuve de lave, et qu’en même temps le sol est fortement agité, il est évident que le tremblement de terre est causé par la fracture du volcan : ce phénomène d’ébranlement tout local est parfaitement analogue à ceux qui se produisent lors de l’explosion d’une mine ou d’une poudrière. Quand la fissure est d’une longueur considérable et que les parois rompues du volcan offrent une grande épaisseur, la secousse est violente et se répercute en longues oscillations dans les contrées avoisinantes. Quand au contraire les roches du volcan, lentement amincies et fondues par les laves montantes, cèdent facilement à la pression qui les fait éclater, l’explosion ne se fait guère ressentir que dans le voisinage immédiat de la fissure : ainsi, lors de la dernière grande éruption de l’Etna, les trépidations du sol qui coïncidèrent avec la formation de la crevasse furent en général assez légères, et la plus forte, encore perceptible dans la ville d’Aci-Reale, ne dépassa pas la région etnéenne proprement dite. L’histoire offre aussi plusieurs exemples d’éruptions volcaniques pendant lesquelles le sol n’a pas été secoué d’une manière sensible : en mai 1855, le Vésuve vomit une quantité considérable de laves sans qu’on ait pu constater ni à l’observatoire du volcan, ni à Naples, la moindre trace de tremblement de terre.

Lorsque des secousses font vibrer le sol d’une région volcanique sans que l’on puisse observer la moindre coïncidence de ces phénomènes avec l’éruption d’un cône de cendres ou l’émission d’un courant de lave, on n’a évidemment aucune raison scientifique pour affirmer avec certitude que ces secousses ont leur origine dans le foyer caché des matières incandescentes