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tique italienne pourrait espérer de tirer parti de l’intervention personnelle de l’impératrice ; mais ce qui nous importe à nous, c’est justement de nous tenir à l’écart de toutes ces incertitudes et de laisser aux seuls acteurs qui sont réellement en jeu leur responsabilité tout entière. Dans la voie de la coopération officieuse et réservée qui nous est ouverte, nous pouvons rendre d’ailleurs au pape et à l’Italie des services très efficaces. Le contact où vont se trouver les gouvernemens italien et romain créera toute sorte de nécessités pratiques qui les lieront progressivement, et conduiront la question romaine à une solution raisonnable. Par exemple, pourquoi, enclavé dans l’Italie, l’état romain conserverait-il des douanes propres ? Le bon sens et l’intérêt commun n’indiquent-ils point que Rome et l’Italie devront former un Zollverein, et qu’il sera plus avantageux à la cour de Rome de recevoir le produit net de son revenu douanier sans avoir les frais et les embarras d’une perception indépendante ? La question de la circulation monétaire et de la banque, qui dans ces derniers temps a créé un grand trouble dans l’état romain, doit aussi se régler par une fusion de la Banque de Rome avec la Banque d’Italie. Les chemins de fer doivent être également une cause de rapprochement et d’action commune. La transformation progressive commencera par les intérêts matériels ; elle ne tardera pas à produire des améliorations dans les relations politiques. Même en gardant un gouvernement séparé, l’état romain ne pourra pas longtemps séquestrer sa population des droits et des intérêts de la nationalité italienne. Les systèmes fédéraux ont donné plus d’une fois la preuve que la communauté de nationalité se pouvait concilier avec la séparation des gouvernemens qui se partageaient des peuples de même race. Tout en restant souverain de l’état romain, le pape ferait acte de justice et de sage politique en laissant ses sujets libres de chercher dans le royaume d’Italie le développement et les applications de leurs ressources, de leur éducation, de leur ambition. Suivant le vœu exprimé depuis longtemps par l’aimable et honnête d’Azeglio, dont M. Eugène Rendu vient de publier l’intéressante correspondance, les Romains ne devraient point être privés par leur gouvernement des droits et des avantages de la concitoyenneté italienne. A l’usage encore, on ne tardera point à connaître l’étendue des besoins financiers de la cour de Rome, et l’on sera en mesure d’y faire face par un arrangement entre les puissances catholiques. L’Italie et l’état romain dans l’ordre des intérêts politiques et matériels se pénétreront ainsi peu à peu ; l’union se fera par la nature et le progrès des choses ; la cour de Rome se convaincra par l’expérience qu’elle peut conserver la somme d’autorité politique nécessaire à son indépendance religieuse, tout en se débarrassant de tracas d’administration locale auxquels elle était peu propre, qui suscitaient contre elle des hostilités légitimes, et qui nuisaient par contre-coup aux intérêts religieux qu’elle représente. La cour de Rome et le gouvernement italien doivent apporter la plus prompte attention à l’ordre d’intérêts que nous si-