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sujets qui lui restent, entre le gouvernement du catholicisme et l’Italie, ne produira point tout de suite les vastes conséquences qu’en attendent les partisans de la liberté de conscience et du système volontaire en matière de cultes. Il faudra beaucoup de temps et la révélation de nécessités pratiques lentement développées pour changer le point de vue auquel la hiérarchie catholique est placée aujourd’hui dans la conception des rapports de l’église avec l’état. Avant d’en venir là, il y aura sans aucun doute une longue période de transition à parcourir ; il est, suivant nous, d’un intérêt si grand que cette transition s’accomplisse naturellement et régulièrement, que nous souhaitons qu’elle ne soit troublée et retardée par aucune impatience et aucune brusquerie violente du côté des partisans de la séparation des pouvoirs spirituel et temporel. Les apparences à cet égard confirment nos vœux. Il est maintenant évident que, si la convention du 15 septembre échoue, ce ne sera point par la faute de l’Italie. Les hommes qui sont à la tête du mouvement italien, et il n’est que juste de désigner personnellement en cette circonstance le chef du cabinet de Florence, le baron Ricasoli, travaillent avec une sincérité incontestable au succès de la convention. Les représentans de la politique italienne, ralliés à la formule de M. de Cavour, l’église libre dans l’état libre, ont une foi trop réfléchie dans les droits de la conscience religieuse et de la liberté civile pour ne pas se prêter avec la plus patiente complaisance à l’expérience qui va se tenter. Ils sont d’ailleurs secondés merveilleusement dans cette œuvre par l’état politique actuel de l’Italie. L’achèvement de l’indépendance nationale, l’exclusion absolue de l’Autriche, l’incorporation de la Vénétie, ont fait disparaître toutes les causes de crainte, d’irritation et de haine qui pouvaient troubler l’Italie dans ses rapports avec la papauté. Le pouvoir temporel ne peut plus être considéré comme la forteresse d’une domination étrangère au centre du pays. Rome cessant d’être un prétexte d’intervention étrangère, l’Italie appartenant tout entière aux Italiens, le patrimoine de Saint-Pierre n’est plus qu’une enclave insignifiante qui ne peut plus être pour la nationalité italienne une cause d’alarme. Les restes du pouvoir temporel, dépouillés de la protection des armées des autres puissances, ne sont plus une menace pour l’indépendance nationale. Le point de vue italien change au contraire tout à coup à l’endroit de Rome. Les patriotes italiens peuvent maintenant prendre en considération avec une pleine liberté d’esprit l’importance dont peut être pour leur pays la continuation de la résidence du gouvernement du catholicisme dans Rome. Ces patriotes ont désormais le droit de mettre en balance l’avantage qu’a l’Italie à conserver la papauté et l’espèce de découronnement qu’elle subirait, si elle rendait le séjour de Rome impossible au patriarcat catholique. On voit donc que la fin de la conquête autrichienne et de l’intervention française ouvre des perspectives toutes nouvelles sur les rapports des Italiens et de la cour de Rome. Les dispositions des Italiens vis-à-vis du pape sont radicalement changées. Au lieu de redouter et de repousser dans le