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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



30 novembre 1866.

Il y a des coïncidences étranges. Dans les spectacles qu’elle se donne à elle-même, la politique française se trouve en présence de deux péripéties qui s’unissent par une commune ressemblance. Nous étions à Rome et au Mexique : nous quittons au même moment le Mexique et Rome. Nous terminons à la fois deux occupations militaires ; des points les plus extrêmes, nous rappelons en même temps des troupes françaises. La double retraite est accompagnée des deux côtés de circonstances graves et de perplexités dramatiques. Nous revenons du Nouveau-Monde en renonçant à une entreprise arbitraire et chimérique, et nous retirons l’appui de notre force à une des plus hautes institutions du monde ancien. Nous assistons à un épisode singulier de l’histoire de France ; en vérité, il y a bien là de quoi secouer notre torpeur.

Des deux événemens dont nous attendons l’issue, le premier accompli, le plus rapproché de nous sera l’évacuation de Rome. Le 11 décembre prochain, les derniers soldats que la France avait délégués à la protection du pouvoir pontifical s’embarqueront à Civita-Vecchia. Le pape et les Romains, le pape et l’Italie, se trouveront en présence, et leurs relations réciproques ne seront plus dominées et offusquées par une intervention étrangère. Une situation si imminente, si nouvelle, si problématique, à laquelle sont attachés de si vastes intérêts politiques et moraux, fait naître mille questions auxquelles personne ne paraît être encore en état de répondre. On n’a jamais vu dans une attente si générale et si anxieuse une pareille sobriété de conjectures et de prédictions. Le parti le plus sage serait peut-être pour nous d’imiter la réserve commune et d’attendre les faits avec une curiosité passive. C’est l’attitude que nous choisirions, s’il n’était point permis d’espérer jusqu’au dernier moment quelque bon effet de l’expression des sentimens de conciliation et des conseils de la prudence.

L’établissement des rapports naturels et libres entre la papauté et les