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doute, dont la moindre était cette question du serment que le gouvernement italien persistait à exiger des évêques. J’avoue que je n’ai jamais bien compris l’importance de cette question du serment vis-à-vis d’un corps tel que l’église qui a religieusement le pouvoir de se délier de sa propre autorité. Ce qui est probable, c’est que le gouvernement italien ne se servait de cette question du serment que comme d’un prétexte pour déguiser ses embarras, c’est que même dès ce moment il n’était point éloigné de croire qu’une négociation pourrait être suivie plus sérieusement, plus fructueusement et peut-être avec plus de dignité lorsque l’occupation étrangère à Rome aurait cessé, lorsque l’Italie et la papauté se trouveraient seules en présence. C’est du moins ce qui a toujours empêché jusqu’ici de reprendre cette œuvre interrompue.

Les esprits d’ailleurs étaient singulièrement partagés à Turin et à Florence, où le gouvernement se transportait bientôt, et ils étaient partagés, non sur l’utilité, sur la convenance des concessions, mais sur la mesure de ces concessions par rapport au but politique que chacun entrevoyait à travers un arrangement religieux. Il y avait là un trait curieux dans le mouvement des opinions. Ceux qui voulaient sérieusement st résolument aller à Rome le plus tôt possible étaient coulans sur les difficultés religieuses; ils auraient tout accordé. Ceux qui acceptaient l’idée d’un ajournement de possession matérielle, qui sentaient l’utilité de cet ajournement, se montraient plus difficiles, pour ne pas aller trop vite. De là les embarras du gouvernement. D’un autre côté, à Rome, le désir du succès était vif chez le pape, et si la négociation avait pu s’engager directement avec lui, elle eût réussi sans doute dès lors. Dans cette première phase, rien n’était perdu encore malgré l’attitude d’hostilité passive de tous ceux qui voyaient avec peine s’ouvrir une voie de conciliation. Le voyage de M. Vegezzi à Turin trancha la question. En laissant voir les hésitations du gouvernement italien, ce voyage rendait l’espérance au parti réactionnaire romain, qui reprenait courage et redoublait d’efforts.

Quand M. Vegezzi reparut à Rome, tout était changé, et ici je voudrais laisser parler un homme d’un esprit aussi sincère que sérieux et élevé, un ancien ambassadeur d’Espagne, mort peu après, M. Pacheco, qui écrivait de Rome : « Lorsqu’après vingt-cinq jours d’absence M. Vegezzi est revenu à Rome, les choses n’étaient plus aussi faciles, et l’avenir ne se présentait pas aussi flatteur. En premier lieu, M. Vegezzi lui-même n’avait pu convaincre le gouvernement italien, au moins en totalité, et il avait ordre d’insister pour que les nouveaux évêques prêtassent serment de fidélité à Victor-Emmanuel. En second lieu, l’atmosphère de cette cour de