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a été l’objet de critiques sévères venues d’hommes très compétens, qu’on a prétendu que sans cette persistance l’équilibre se serait rétabli plus vite, que les capitaux étrangers n’arrivaient pas dans la crainte des sinistres que cette situation faisait supposer, que ceux qui étaient dans le pays s’en allaient pour la même raison, qu’à l’intérieur enfin le crédit était restreint parce qu’il manquait de confiance. Cette explication n’est pas suffisante; ce n’est ni l’éloignement d’une quantité toujours peu considérable de capitaux étrangers, ni des appréhensions au sujet du crédit à l’intérieur qui auraient pu altérer le change pendant trois mois et obliger l’Angleterre à faire au dehors des remises plus ou moins importantes en numéraire, et la preuve, c’est que cette infériorité du change ne s’est corrigée que lorsque l’élévation du taux de l’escompte a eu produit son effet ordinaire sur les opérations commerciales en les restreignant. On n’a qu’à lire le relevé du board of trade pour les sept premiers mois de cette année, on y verra que les deux derniers sont en diminution relative par rapport aux deux premiers. Voici les chiffres pour le commerce d’exportation :


1864 Deux premiers mois 23 millions de livres sterl.
1865 Idem. 22 —
1866 Idem. 29 1/2 —
1864 Juin et juillet. 28 millions de livres sterl.
1865 Idem 27 —
1866 Idem 29 1/2 —

Ainsi l’augmentation, qui était de 5 millions sur 1864 et 1865 pendant les deux premiers mois, n’a plus été que de 1 à 2 millions 1/2 pour juin et juillet. C’est là, beaucoup plus que le retour des capitaux étrangers, ce qui a rétabli l’équilibre et permis à la Banque d’Angleterre d’abaisser successivement son escompte, et en très peu de temps, de 10 à 5 pour 100.

En 1857 et en 1864, aux deux dernières époques de crise, pour des raisons à peu près identiques, telles que des spéculations excessives jointes à des besoins de denrées de première nécessité, comme les céréales en 1856 et 1857, comme le coton en 1863 et 1864, l’Angleterre et la France avaient épuisé leurs ressources. C’était à qui s’en procurerait au plus haut prix parmi celles qui pouvaient se trouver disponibles quelque part dans le monde. Celui des deux pays qui serait resté en arrière et qui se serait obstiné à maintenir le taux de l’escompte au-dessous de son voisin se serait privé du concours de ces capitaux, et aurait vu une partie des siens s’en aller. Nous devions d’autant plus nous préoccuper, quant à nous, de cette situation que nous avions le change défavorable vis-à-vis de l’Angleterre. Il y a dans le monde, et particulièrement en Eu-