Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 66.djvu/354

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que le transport a lieu dans un seul sens. Un autre fait important, c’est que l’étincelle est stratifiée : on y voit des couches superposées, il semble que le flux électrique n’y soit pas continu. Sans doute, il y a là un phénomène analogue à celui qui se produit quand nous voyons la fumée sortir d’une cheminée par bouffées successives. Lorsqu’un flux rencontre un obstacle, il produit pour le vaincre des poussées qui se superposent. Peut-être aussi la stratification de l’étincelle n’est-elle pas, comme le transport des parcelles métalliques, un accident purement local ; peut-être accuse-t-elle un état de choses qui se produit dans toute l’étendue du conducteur. Il faudrait dire alors que le transport de l’éther a lieu par ondes successives ; mais ces ondes, qui accompagnent un mouvement de transport, ne devraient en aucune façon être confondues avec les ondes vibratoires dont la lumière et le son nous ont offert des exemples.

On voit qu’en ce moment nous faisons une réserve importante. Nous avons admis jusqu’ici que l’éther est réellement transporté d’un bout à l’autre du conducteur, que chaque atome engagé dans le circuit le parcourt dans toute son étendue. Il se peut au contraire que chaque atome ne soit soumis qu’à un parcours partiel, et que le courant se produise en quelque sorte par une série de relais plus ou moins rapprochés. Nous laisserons la porte toute grande ouverte à cette supposition, qui n’a rien d’incompatible avec ce que nous avons, dit jusqu’ici ; mais, pour la simplicité du langage, nous continuerons à nous exprimer comme s’il s’agissait d’un fluide en mouvement dont tous les élémens accomplissent la totalité du parcours.

Il est enfin un dernier enseignement que l’on a souvent demandé à l’étude de l’étincelle, enseignement de haute conséquence et qu’elle n’a pu donner que d’une manière incomplète. L’étincelle se produit-elle dans le vide absolu ? En d’autres termes, le flux électrique, tout en n’étant qu’un mouvement de l’éther, peut-il exister en dehors de la matière pondérable ? On conçoit l’importance de cette question, à laquelle nous ne trouvons point de réponse dans les phénomènes généraux de la nature ; le soleil nous envoie de la lumière, nous n’en recevons pas directement d’électricité. Les expériences que l’on a multipliées pour savoir si l’étincelle passe dans le vide absolu sont très controversées. Comment faire un vide absolu ? On cherche à purger un tube de toute matière pondérable, On le remplit à plusieurs reprises d’acide carbonique que l’on expulse à l’aide d’une machine pneumatique, puis on absorbe avec de la potasse les restes de l’acide ; mais n’y a-t-il pas des vapeurs qui sortent des mastics, des soupapes de l’appareil, de la potasse elle-même ? Comment s’affranchir de cette cause d’erreur ? Aussi, nous le répétons, rien n’est moins certain que le résultat d’une pareille