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primordiale l’électrie, c’est-à-dire la quantité d’électricité nécessaire pour produire un effet déterminé. Quel effet choisira-t-on désormais pour type ? C’est, une question à discuter. Supposons, uniquement pour fixer les idées, qu’on choisisse la décomposition voltamétrique d’un kilogramme d’eau. L’électrie étant ainsi déterminée, on s’efforcera d’exprimer, à l’aide de cette unité fondamentale, les divers phénomènes électriques qui jusqu’ici ne sont spécifiés que par des circonstances particulières, tantôt par l’intensité du courant, tantôt par la chaleur qu’ils développent. Au lieu de s’arrêter à des effets partiels, on se rapprochera de l’ensemble des faits. Il se fera dès lors un triage naturel dans cet amas incohérent d’observations que présente aujourd’hui la science électrique ; les lois isolées se grouperont, et leur sens intime apparaîtra.

Choisir l’électrie, voilà le premier progrès que les électriciens ont à réaliser, et voici le second : déterminer l’équivalent mécanique de l’électricité, chercher à combien de kilogrammètres équivaut une électrie. On voit en ce moment par un exemple caractéristique l’utilité d’une hypothèse qui embrasse l’ensemble des phénomènes naturels et les ramène à un même principe. Elle peut guider le physicien dans les régions mal connues qu’il explore ; elle lui enseigne la voie qu’il doit suivre à travers les dédales des faits particuliers. Notons cependant que, pour faire les deux pas que nous indiquons, il n’est pas nécessaire que l’on ait une vue préalable sur la nature même de l’électricité. Si nous consultons l’histoire de la chaleur, nous verrons que l’idée de la calorie n’a point été propre à ceux qui prétendaient que la chaleur est un mouvement ; on pourrait même remarquer que cette unité a comme un air suspect, et qu’elle sent en quelque sorte la doctrine de la matérialité du calorique. L’équivalence de la chaleur et du travail mécanique a été aussi établie en dehors de toute théorie. C’est une notion prudente et éclectique que celle d’équivalence ; elle n’implique pas d’idée préconçue sur les faits que l’on compare ; ils s’équivalent, voilà tout. Dès que l’on est certain que l’on compare deux mouvemens, les mots d’équivalent, d’équivalence, deviennent pour ainsi dire insuffisans, et l’on a le droit de recourir à des termes plus énergiques. Fixer l’électrie d’abord et ensuite en déterminer l’équivalence mécanique, voilà donc les deux points où doivent avant tout porter les efforts, et que nous avions à cœur de signaler. Après avoir donné ces indications générales, il nous reste à montrer ce que l’expérience nous apprend dès maintenant sur les conditions qui particularisent le mouvement électrique.