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tout à l’heure la sphère d’action des molécules. Tant que les atmosphères ne se touchent pas, nulle action de ce chef : c’est le cas des gaz. Si les molécules se rapprochent et que les atmosphères viennent à glisser l’une contre l’autre (c’est le cas des liquides), l’action commence, action purement mécanique, due à la rencontre des atomes éthérés. Si enfin les atmosphères entrent plus profondément les unes dans les autres, l’effet s’accuse plus énergiquement ; les enveloppes éthérées qui se pénètrent se trouvent gênées dans leur marche et agissent pour rendre respectivement parallèles, comme il arrive dans les solides, les rotations des diverses molécules. C’est un aperçu que nous donnons chemin faisant. Passons vite ; aussi bien nous ne voulons pas nous attarder à parler des liquides et des solides, dont la constitution demeure jusqu’ici fort obscure. Il nous suffit d’avoir montré comment les lois de cette constitution se rattachent aux lois, beaucoup mieux connues, qui régissent l’état gazeux. Grâce à cette solidarité, les gaz nous offrent un type commode pour étudier le mouvement moléculaire, et nous pouvons arrêter sur eux notre attention pendant quelques instans encore, certains d’en tirer des enseignemens applicables à toutes les formes de la matière.

La théorie des gaz, dont nous indiquions tout à l’heure le principe, a été fort travaillée dans ces dernières années et a donné lieu à un grand nombre de publications remarquables. Elle ne se présente pourtant pas comme une conception tout à fait nouvelle, car on pourrait en trouver l’idée fondamentale dans l’Hydrodynamique de Bernouilli, publiée en 1738 ; mais, enfouie dans l’ouvrage de Bernouilli, elle n’a guère revu le jour que depuis une trentaine d’années, et elle n’a reçu ses développemens que par les travaux tout récens de M. Joule et de M. Clausius. Nous ne pouvons suivre ici ces deux physiciens dans les déductions analytiques au moyen desquelles ils ont donné à la théorie des gaz une admirable précision. Nous pourrons du moins montrer comment l’hypothèse que nous venons d’esquisser sur la constitution gazeuse rend compte des faits que l’expérience avait successivement révélés. Du simple énoncé de cette théorie, nous allons voir sortir, comme des conséquences nécessaires, quelques-unes de ces lois célèbres qui forment les premières assises de la physique.

Et d’abord il résulte de notre hypothèse que les molécules d’un gaz peuvent être considérées à chaque instant comme se mouvant toutes en ligne droite avec une vitesse uniforme commune à toute la masse ; nous avons en effet éliminé les phénomènes perturbateurs qui se produisent au moment des chocs. N’est-il pas évident dès lors que, si le gaz est contenu dans un récipient, la pression qu’il