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on ne peut répondre que par l’examen des faits, et c’est ainsi que nous avons entrepris une courte excursion à travers les diverses régions de la physique. L’ordre naturel de ce travail nous conduit maintenant à nous occuper de la chaleur, et nous nous trouvons ainsi ramenés aux découvertes qui ont servi d’origine à la théorie de l’unité des forces physiques.

Ici notre tâche devient facile peut-être, mais, il faut le dire aussi, un peu ingrate. L’équivalence de la chaleur et du travail mécanique est Revenue depuis trois ou quatre années une notion usuelle ; des livres, des cours publics, des conférences l’ont répandue dans le public ; elle a été vulgarisée avec un grand zèle. Nous n’avons donc point à craindre que ce sujet soit étranger à nos lecteurs ; nous craignons plutôt qu’on ne leur en ait trop parlé et qu’ils ne le regardent comme un lieu commun. Nous ne ferons donc que rappeler très brièvement les principes de la thermodynamique, et nous nous attacherons plus particulièrement à mettre en lumière les conséquences que l’on en tire au sujet de la constitution des corps.

Mentionnons d’abord un livre qui présente sous une forme claire et agréable toutes les données essentielles de la nouvelle théorie de la chaleur. Il contient douze leçons professées par M. John Tyndall à l’Institution royale de Londres sur la chaleur considérée comme un mode de mouvement. Le cours a été fait en 1862 ; le livre a paru en France, traduit par M. l’abbé Moigno en 1864, et il a été tout de suite apprécié à sa juste valeur par toutes les personnes qui s’intéressent au mouvement général des sciences. Il est impossible de donner à des leçons de physique plus de charme à la fois et de netteté que ne le fait M. Tyndall dans l’ouvrage que nous citons. Le livre a conservé la forme de l’enseignement oral ; on y suit la parole, les mouvemens du professeur ; on assiste aux détails, aux accidens mêmes des expériences. Il ne faudrait pas croire cependant qu’on se trouve en présence d’une improvisation reproduite par la sténographie. Beaucoup d’art se cache sous les apparences de ce procédé facile. M. Tyndall calcule habilement tous ses effets ; les accidens n’arrivent dans ses expériences qu’à bon escient : ce sont d’heureux accidens qui se produisent juste à point, quand il veut saisir l’attention de son public, auditeurs ou lecteurs, et appeler brusquement les esprits sur quelque anomalie piquante. Les expériences de M. Tyndall sont d’ailleurs conçues avec beaucoup d’habileté ; il est depuis longtemps passé maître dans l’art de professer devant un nombreux auditoire. Il a imaginé des instrumens ingénieux qui amplifient les résultats ; un des premiers, il s’est servi de la lumière électrique pour projeter sur des écrans l’image agrandie des phénomènes les plus délicats : cette mise en