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marine Dépretis, son ami, qu’il s’adresse) est resté exposé sur la poupe de la frégate amirale de onze heures à six heures et demie à une tempête de grenades (sic). » Puis, du même trait de plume, il délivre un certificat de bonne conduite et de vaillance à l’amiral Persano. « Persano, dit-il, est injustement accusé. Il mérite la confiance entière du gouvernement et de la nation. La lourde responsabilité qui pesait sur ses épaules peut l’avoir rendu défiant outre mesure ; mais vous, qui savez en quel état était la flotte il y a huit jours, vous lui rendrez justice. Vous verrez comme il sait se battre. Maintenant que le moment de l’action est venu, quelle différence entre lui et les autres ! » Les batteries du fond du port continuaient un feu très vif : la Formidabile reçut l’ordre d’aller s’embosser à l’entrée du mouillage intérieur, et les deux frégates la Maria-Pia et le San-Martino d’y pénétrer pour la soutenir ; mais à cet instant, un peu après trois heures, l’avis arriva au commandant en chef que le contre-amiral Vacca, voyant ses efforts impuissans contre les batteries de Porto-Camisa, trop haut placées et hors de ses atteintes, avait spontanément quitté le poste qui lui était assigné et rallié à Porto-Manego le pavillon du vice-amiral Albini. On lui expédiait déjà l’ordre de laisser au moins une de ses frégates à Porto-Camisa pour occuper les défenseurs, quand on le vit arriver avec sa division à l’entrée du port San-Giorgio, où il se mit à canonner la tour du télégraphe et les batteries du fond de la baie. Peu après, vers cinq heures, on sut à l’état-major que le vice-amiral Albini n’avait fait aucune tentative sur Porto-Manego, et l’ordre lui fut envoyé de rallier l’amiral, le débarquement devant s’effectuer à Porto-Carober, tout près et dans l’ouest de la presqu’île sur laquelle s’élève le fort San-Giorgio. Ces diverses circonstances ayant un peu modifié les dispositions premières, on hissa vers six heures le signal de former la ligne de front, où vint prendre son poste le contre-amiral Vacca, qui jusque-là avait prolongé le feu. Bientôt aussi parut la division du vice-amiral Albini, pure de toute souillure de poudre.

Il faut bien entrer dans tous ces détails si l’on veut comprendre ce qu’était la flotte italienne.

Donnerons-nous le nom de conseil de guerre à une réunion d’officiers qui eut lieu le soir à bord du Re-d’Italia et dans laquelle, sous les yeux du député Boggio, ce même amiral Persano, qui avait déclaré ne pouvoir rien sur Lissa sans une force militaire imposante, exprimait maintenant l’intention de reprendre l’attaque pendant la nuit, ou au plus tard le lendemain des le point du jour ? Les capitaines Morale et Taffini faisaient simplement observer que, si l’on prenait dans les équipages seulement douze cents hommes de