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des teintes qui sont transmises par l’air, et qui varient suivant l’épaisseur que les rayons traversent avant d’atteindre les amas de vapeurs qui les réfléchissent à nous. Les impuretés dont l’air est chargé exercent sans doute une grande influence sur la distribution de ces teintes, car la couleur du soleil couchant peut varier depuis le rouge de sang jusqu’au jaune et même au bleu ; beaucoup de personnes se rappellent en effet qu’en 1831 on a observé un soleil bleu dans une grande partie de l’Europe et en Amérique.

Des phénomènes de tous points analogues sont offerts par les solutions légèrement opalescentes. De l’eau contenant une très petite quantité de soufre finement divisé paraît à peine laiteuse, mais elle intercepte les rayons bleus et ne donne passage qu’aux rayons rouges, de sorte que la lumière électrique, regardée à travers une certaine épaisseur de cette eau, produit l’effet d’un soleil couchant ; la même solution intercepte aussi les rayons chimiques. On peut encore faire cette expérience avec une lame de verre opalin, qui paraît également bleuâtre par réflexion et rougeâtre ou orangé par transparence. L’or très divisé, en suspension dans l’eau, transmet la lumière bleue, pourpre ou vermeille, selon l’état de division où il se trouve ; en feuilles très minces, il est vert par transmission.

Tous ces faits nous montrent combien le problème de la distribution des rayons lumineux est complexe, combien il serait difficile de l’aborder autrement que par l’observation directe et suivie des intensités actuelles de la lumière sur différens points du globe. Ce qui vient d’être dit des rayons lumineux s’applique aussi aux rayons chimiques obscurs, car rien ne prouve qu’ils soient sujets à des lois plus simples que les premiers. Tout fait prévoir au contraire que la lumière chimique, directe ou diffuse, offrira, comme la lumière visible, une coloration changeante et des propriétés différentes suivant la nature des milieux qu’elle a, traversés, suivant la position du soleil dans le ciel et suivant le degré d’humidité de l’atmosphère. Il faut donc de toute nécessité recourir à l’observation directe.

Pour connaître les lois qui président au partage inégal de la chaleur solaire entre les différentes zones de la terre, les météorologistes consultent le thermomètre. Ils notent les maxima et les minima et la température moyenne de la journée. Ces données leur permettent de calculer la température moyenne de chaque mois, de chaque saison, de l’année entière, et de connaître les changemens qui surviennent dans ces élémens du climat thermique. Un réunissant les mêmes données pour un grand nombre de stations, on parvient à tracer sur une mappemonde les isothermes ou lignes d’égale température annuelle, et une foule d’autres courbes qui permettent d’embrasser d’un seul coup d’œil les lois que suivent les températures terrestres. Il s’agit de savoir si des résultats analogues peuvent s’obtenir pour les effets chimiques de la lumière, s’il sera possible un jour de dresser des lignes isochimiques indiquant les climats également favorisés sous