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imparfaitement les impuretés accidentelles de l’atmosphère, nous connais-. sons encore moins l’intensité relative de l’action qu’elles exercent sur les différens rayons ; il faut donc en résumé revenir à l’observation directe, si l’on veut acquérir des notions exactes sur la distribution des rayons lumineux et sur ce que j’ai nommé le climat chimique.

La vapeur d’eau qui remplit les couches basses de l’atmosphère est invisible ; les brouillards et les nuages sont de la vapeur condensée, de l’eau à l’état liquide. Les poussières atmosphériques deviennent visibles lorsqu’un rayon de soleil vient à percer un épais nuage dont l’ombre se projette sur le sol ; la lumière réfléchie par les atomes en suspension dans l’air trace alors manifestement la route du rayon. Le météore appelé qobar en Ethiopie, la callina des Espagnols et les brouillards secs en général sont probablement des amas de matières solides très divisées. D’où viennent ces poussières ? Elles sont ramassées par les vents qui balaient la surface terrestre. On ne les découvre pas toujours par l’analyse chimique de l’air, du moins lorsqu’on n’emploie que les réactifs ordinaires, qui sont impuissans à déceler des traces infinitésimales de substances étrangères. L’analyse spectrale nous a déjà appris à cet égard des faits très importans et inattendus ; elle a démontré, par exemple, que l’air est toujours rempli de parcelles de soude à un état de division extrême, dont l’origine doit être cherchée dans les grandes nappes d’eau salée qui recouvrent les deux tiers de la superficie du globe. Les étoiles filantes contribuent peut-être aussi à charger l’atmosphère terrestre de poussières minérales. Depuis des centaines de siècles, elles tombent en nombre incalculable ; qu’y aurait-il d’étonnant à ce qu’on en trouvât des traces matérielles permanentes à la surface du sol et dans l’atmosphère ? M. de Reichenbach, qui a publié d’importantes recherches sur les météorites, pense que c’est aux étoiles filantes qu’il faut attribuer la présence constante de traces de phosphore et de magnésie dans le sol arable, ainsi que celle des atomes de cobalt et de nickel qui se rencontrent toujours, d’après le même auteur, dans les couches superficielles des terrains. Ces météores, dit M. de Reichenbach, entretiennent sans cesse dans l’atmosphère une petite pluie fine et impalpable de matières solides dont l’accumulation graduelle finit par produire comme un engrais minéral que la terre recevrait des espaces célestes. Voilà donc une des sources des impuretés dont l’atmosphère est toujours chargée. Il faut y ajouter les innombrables germes organiques, la poussière fécondante des végétaux, les œufs d’infusoires et les spores de mucédinées qui flottent dans l’air, qui sont la cause prochaine des fermentations et peut-être celle des épidémies. En outre l’air contient toujours, dans les couches voisines du sol, une foule d’émanations gazeuses : de l’acide carbonique provenant des combustions, % des traces d’oxyde de carbone, d’hydrogène carboné, d’ammoniaque, et de quelques autres substances dont la présence tient à des causes locales. Les odeurs mêmes sont quelque chose de matériel : ce sont des effluves