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ne suit que bien vaguement les parallèles de latitude, et les lignes isothermes qui réunissent les points ayant même température moyenne serpentent à la surface terrestre en méandres capricieux ; mais cela tient à la nature particulière de la chaleur. Une grande partie du calorique qui naît de l’absorption des rayons solaires dans l’eau et dans le sol qu’ils frappent est enlevée et transportée par les courans de la mer ou par les vents, de sorte qu’il arrive rarement qu’elle soit utilisée au moment et au lieu même où elle prend naissance. Le gulf-stream vient baigner de ses eaux tièdes les côtes des Iles septentrionales, et les vents du sud nous apportent des bouffées d’air chaud des déserts africains. Ces causes modifient puissamment la distribution originelle des températures terrestres entre les régions polaires et l’équateur, et tendent à les égaliser par l’agitation continuelle des eaux de la mer et des couches atmosphériques. Il n’en est plus de même lorsque nous considérons les radiations chimiques. L’effet qu’elles produisent se fixe au point même qu’elles frappent ; ni les vents ni les eaux ne le transportent au loin. C’est du moins ce que nous devons admettre jusqu’à preuve du contraire. L’air ne paraît point acquérir des propriétés nouvelles par suite du passage des rayons chimiques, tandis qu’il est échauffé par le rayonnement du sol qui a été exposé à l’ardeur du soleil ; il n’y a donc pas de vent chimique comme il y a des vents chauds. Tout l’effet des rayons actifs s’épuise sur place ; il semble que nous n’ayons qu’à en considérer l’obliquité variable pour nous faire une idée déjà très approchée du climat chimique d’un point donné du globe.

Les faisceaux de rayons très obliques couvrent une plus grande étendue de la surface terrestre que ceux qui la frappent d’aplomb ; chaque unité de surface reçoit, par cela même, beaucoup moins de lumière dans le premier cas que dans le second, car l’effet s’éparpille et s’atténue à mesure que la surface offerte aux mêmes rayons s’accroît. Une bougie placée auprès d’une feuille de papier l’éclairé de moins en moins à mesure qu’elle se consume et que la flamme descend plus bas ; c’est l’effet de l’obliquité croissante des rayons lumineux et l’imitation exacte de ce qui se passe lorsque le soleil s’approche de l’horizon. Or nous connaissons la hauteur que le soleil peut atteindre chaque jour sous une latitude donnée ; nous connaissons de même la loi d’après laquelle l’intensité de la lumière varie avec cette hauteur ; rien de plus simple dès lors que de déterminer à priori la quantité de lumière qu’un lieu donné peut recevoir chaque jour, ainsi que la somme que ces rations journalières produisent au bout de l’année. Toutefois ce serait compter sans l’atmosphère.

L’élément transparent et léger qui nous environne ne fournit pas seulement aux êtres vivans les gaz nécessaires à la respiration, il intervient encore d’une manière très essentielle dans le partage général de la lumière et de la chaleur que nous dispense le soleil. Nous avons déjà vu que les vents se chargent de disséminer à la surface de la terre la chaleur qu’ils enlèvent au sol embrasé des contrées tropicales ; mais là ne se borne pas le