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d’ailleurs dans cette ombre une ou plusieurs raies lumineuses. Si on reçoit sur un écran l’image du trou percé dans le volet, on voit un cercle blanc entouré d’un anneau obscur, puis d’un anneau blanc plus brillant que la partie centrale, puis d’un second anneau obscur, et enfin d’un nouvel anneau blanc très faible. — Si l’on perce dans le volet d’expérience deux très petits trous distans, l’un de l’autre d’un ou deux millimètres et qu’on reçoive les deux images sur un écran de telle sorte qu’elles empiètent l’une sur l’autre, on trouve que, dans le segment lenticulaire où elles se pénètrent, les cercles sont plus obscurs que dans la partie où elles sont séparées ; on voit ainsi qu’en ajoutant de la lumière à de la lumière on peut produire de l’obscurité.

Ces faits si curieux, minutieusement décrits par le père Grimaldi, nous paraissent tout à fait décisifs, maintenant que nous en saisissons le sens intime. Il nous semble qu’ils auraient dû faire triompher sans délai le système des ondulations ; mais ceux même qui en appréciaient la valeur au XVIIe siècle étaient loin d’en tirer toutes les conséquences. Ces expériences servaient du moins à alimenter la controverse. — Des corpuscules, disait Huyghens, qui viendraient directement du soleil et qui passeraient par le petit trou du volet, formeraient, au sortir du trou, un cylindre étroit et non un cône. La forme conique prouve un mouvement qui se propage latéralement au rayon lumineux. — Newton retournait l’argument. Si la lumière est un mouvement, disait-il, elle ne devrait pas rester confinée dans un cône étroit ; elle devrait se répandre dans tous les sens et se disperser circulairement autour de chaque point d’ébranlement. — Sans doute, répondait Huyghens, en chaque point du rayon lumineux, des ondulations sphériques partent latéralement à ce rayon et se répandent dans tout l’espace environnant ; mais elles ne sont pas assez répétées pour produite la sensation de la lumière ; elles n’obéissent pas à une discipline aussi forte que celles qui se trouvent dans le sens même du rayon et elles se détruisent les unes les autres dans leur confusion.

Le premier savant qui vit tout ce qu’on pouvait tirer des expériences de Grimaldi fut Thomas Young, ce voyageur sagace, qui développa plusieurs branches de physique et qui trouva la clé des hiéroglyphes égyptiens. Les recherches de Young furent continuées par Arago et Fresnel, puis plus récemment par MM. Fizeau et Foucault. Tous ces travaux ont donné l’explication complète des franges de lumière signalées par Grimaldi, et la théorie des interférences, qu’ils ont fondée, est une des plus glorieuses conquêtes de l’esprit moderne.

Le principe des interférences est facile à saisir. Un rayon