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rapproché du soleil. Il arrive en outre très souvent sous le climat humide de l’Angleterre que des nuages obscurcissent la face de notre satellite au moment où il entre dans la ligne du méridien. En un pareil état de choses, on observait imparfaitement une moitié du cours de la lune, et un quart se trouvait entièrement perdu. C’est pour remédier à un tel inconvénient que fut inventé l’altazimuth[1]. Grâce à cet appareil mobile, qui suit la lune dans toutes les parties du ciel au lieu de l’attendre seulement sur un point donné, il n’est guère de nuit, si nuageuse qu’elle soit, où ce globe lumineux, se trouvant sur l’horizon, ne se montre de temps en temps à l’astronome de service. De cette manière, on a de beaucoup étendu le champ des recherches. Avant 1847, époque où fut érigé le nouvel instrument, on obtenait à peine cent observations lunaires par année ; elles s’élèvent maintenant à plus de deux cent douze dans l’établissement de Greenwich. Les résultats acquis à l’aide de l’altazimuth sont ensuite comparés à ceux que donne le transit-circle, et au moyen de ces doubles observations, faites au méridien ainsi qu’en dehors du méridien, on a pu arriver à un degré de certitude inconnu jusque-là dans les autres établissemens astronomiques.

Pour atteindre cet instrument, l’altazimuth, il nous faut monter un escalier étroit tournant autour d’un pilier en briques qui se trouve enfermé dans la maçonnerie. Cette colonne, qui du sol s’élève presque jusqu’au dernier étage, supporte une grosse pierre cylindrique servant de piédestal et en quelque sorte isolée au milieu de l’édifice. De cette manière, on a beau marcher à pas lourds autour de l’instrument, on ne réussit nullement à l’ébranler ; appuyé sur sa ferme base, il est indépendant du plancher de la chambre où il se trouve. Toutes ces précautions délicates sont nécessaires pour assurer le succès des observations astronomiques. L’altazimuth ne ressemble pas mal à une grosse cloche en fonte coulée d’un seul flot de métal et au centre de laquelle on aurait inséré un télescope. Vu pendant la journée, c’est une masse inerte, mais le soir quel changement ! Il en est de ces appareils astronomiques comme des oiseaux de nuit qui, engourdis sous la lumière du soleil, se réveillent à l’heure des ténèbres. Tout d’ailleurs ne s’anime-t-il point autour de l’instrument ? La chambre où il repose est couronnée d’un plafond de bois en forme de dôme, qui se met lui-même en mouvement sous l’impulsion de la main. Cette calotte roulante est percée d’une ouverture masquée durant le jour par des volets qu’on ouvre

  1. Cet instrument est destiné, comme l’indique son nom, à constater deux sortes de phénomènes, l’altitude et l’azimuth. Par altitude il faut entendre l’angle d’élévation d’un astre, par azimuth l’arc de l’horizon entre le méridien de l’endroit et une ligne verticale passant par l’objet observé.