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Une bibliothèque est attachée à l’observatoire et se compose naturellement de livres sur l’astronomie, les mathématiques et le système du monde. L’idée qui a présidé à la formation de cette library et au choix des ouvrages mérite bien d’être signalée. Les assistans sont tous des hommes capables qui font de la science astronomique une étude et une profession ; mais telle est la masse de travaux routiniers auxquels ils sont régulièrement soumis que, si l’on n’y prenait garde, l’établissement pourrait bien dégénérer en un simple bureau de commis. C’est pour éviter cette contagion du positif et réagir contre certaines tendances trop réalistes que M. Airy crut avantageux de fournir à ses aides et collaborateurs le moyen de se mettre en rapport avec la littérature scientifique. Grâce à une telle collection d’ouvrages choisis, ils sont à même d’étudier les systèmes des savans étrangers, les théories des temps anciens et modernes. De cette manière l’homme ne s’incruste point à sa fonction, et le caractère d’astronome peut encore prévaloir sur celui de pur observateur des faits. En agissant ainsi, le directeur a eu non-seulement en vue le présent, mais aussi l’avenir de l’institution ; accroître les connaissances et l’instruction de son personnel, préparer même à ses successeurs les élémens d’une philosophie plus étendue, n’est-ce point élever la valeur morale de l’observatoire ? Je visitai également la chambre des manuscrits, manuscript room, construite en fer, de manière à la prémunir contre les dangers d’un incendie. On n’y allume jamais de feu, mais les murs sont séchés durant l’hiver par un conduit de chaleur. Là reposent couverts d’une vénérable poussière des plans de l’observatoire probablement gravés d’après les dessins de Flamsteed, les manuscrits de Bradley et beaucoup d’autres monumens très précieux pour la science. Dans cette collection figurent aussi toutes les observations des planètes et de la lune faites à Greenwich depuis 1750 jusqu’à nos jours et réduites par M. Airy ; quelles volumineuses archives du ciel !

Je voudrais nettement indiquer le caractère de cette institution astronomique.

Avant de dire ce qu’est l’observatoire de Greenwich, peut-être convient-il de dire ce qu’il n’est point. Il laisse à d’autres curieux le soin de découvrir les taches du soleil et les montagnes de la lune. Les observations des assistans ne s’attachent ni à la figure des planètes, ni aux mouvemens extraordinaires des étoiles doubles qui tournent l’une autour de l’autre dans les profondeurs du firmament, ni au mystère des nébuleuses. Quels motifs invoque l’observatoire de Greenwich pour abandonner ces vastes champs de l’astronomie ? De tels phénomènes, assure-t-on, présentent par eux-mêmes tant de charmes à l’esprit qu’ils trouveront toujours des observateurs