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excessif de les abandonner sans compensation aux chances d’une banqueroute mexicaine. Ils ont été fortement encouragés, on ne le niera point, à souscrire à ces emprunts ; on leur promettait, car on était encore dans les Illusions, que la France maintiendrait son concours à l’empire mexicain jusqu’à ce que cet empire fût capable de vivre par sa propre force ; la portion la plus considérable du produit des emprunts a servi au remboursement des frais de guerre de la France, et par conséquent a payé des dépenses françaises. La situation des porteurs de rentes mexicaines a été prise en considération par le gouvernement français dans la convention financière conclue le 30 juillet dernier avec l’empire du Mexique. Un prélèvement de la moitié des revenus des douanes est accordé par cette convention au gouvernement français, et devra faire face au service des emprunts et au remboursement d’une somme de 250 millions due par l’empire mexicain à la France. Cette convention donnerait des dividendes certains aux porteurs d’emprunt, si le gouvernement de l’empereur Maximilien pouvait nous assurer en fait le prélèvement qu’il nous accorde en droit En ce moment même, l’état des choses n’est plus conforme à la convention, puisque Tampico n’est plus au pouvoir des impérialistes, puisque la seconde ville de l’empire au point de vue du revenu douanier est aux mains des juaristes. Il nous paraît même douteux que l’empereur Maximilien ait des ressources suffisantes pour payer le coupon d’emprunt qui échoit au mois d’octobre prochain. Quand on songe que nous sommes allés au Mexique pour obtenir en faveur de nos nationaux des indemnités qui ont été fixées à une quinzaine de millions, il serait triste, on en conviendra, de laisser en présence d’une délégation sur un débiteur à peu près insolvable des rentiers français devenus créanciers du Mexique pour une somme d’environ 300 millions effectivement versés. Le gouvernement français ne peut manquer d’étudier avec une vive sollicitude la situation des porteurs de fonds mexicains. Il y a là un véritable passif de guerre qu’on ne saurait laisser en souffrance le jour prochain où l’on liquidera le passif politique de la question mexicaine. Il faut que le gouvernement prenne encore sur ce point une résolution mâle et finale.

En dehors de cette question spéciale du Mexique, qui réclame des mesures énergiques et promptes, il serait désirable aussi, pour rétablir l’esprit public dans une bonne assiette, que le gouvernement pût trouver une occasion de faire connaître sa pensée sur la politique qui convient à la France dans l’état actuel de l’Europe. En présence des faits accomplis, cette pensée ne saurait être que pacifique. Nous allons voir se dérouler en Allemagne les conséquences naturelles de la politique prussienne. Nous avons déjà dit qu’il nous paraissait devenu oiseux de répéter les critiques que nous avons dû adresser aux procédés politiques de M. de Bismark. Nous avons exprimé l’opinion que les libéraux français devaient éviter de reporter injustement sur le peuple prussien les préventions que la cour de Ber-