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Sotto-Marina, sont à cheval sur la mer et sur des fleuves dont plusieurs peuvent être remontés dans l’intérieur des terres jusqu’à plus de cinquante lieues de l’embouchure. Au pied de Tampico coulent le Panuco, qui descend de la vallée même de Mexico, et le Tamesis, qui sillonne la Huasteca, la Kabylie des terres chaudes. Le Rio-Bravo enveloppe la frontière du nord ; au sud de l’état de Vera-Cruz, on peut commander une partie des terres chaudes par le Rio-Blanco. Qu’une canonnière navigue sur chacun de ces cours d’eau, ce sera une nouvelle force qui, grâce à la vapeur, pourra se multiplier pour protéger les côtes et faire la police de l’intérieur. Les ports du Pacifique réclament le même service maritime. Plus haut, sur les plateaux du centre, il serait aussi important qu’une canonnière sillonnât le vaste lac de Chapala, qui compte soixante lieues de largeur, et le Rio-Grande, qui relie ce lac à la ville de Guadalajara, la seconde capitale de l’empire. Tout cela n’est pas l’œuvre d’un jour ; mais il faut courir au plus pressé. Huit mois suffiraient pour mener à bonne fin les projets dont l’exécution est la plus urgente. Il faut se hâter, car après le départ des soldats français il sera trop tard pour licencier utilement l’armée mexicaine.

Par la suite, plusieurs modifications commerciales deviendraient nécessaires. La pénurie du trésor public, les fraudes, les dilapidations ont contraint la république à élever pour les objets importés les droits d’entrée à des chiffres fabuleux et à multiplier ces mêmes droits sous différens noms : aussi les marchandises parvenues à destination reviennent-elles au triple de la valeur première. La contrebande et le brigandage disparaissant avec la guerre civile, les recettes publiques reprendront leur cours : ce sera l’heure d’abaisser les tarifs. Les routes étant meilleures, la cherté des transports diminuerait. L’armée française a conquis l’Algérie le fusil d’une main et la pioche de l’autre : le soldat mexicain changera son bivouac en chantier armé. Il est temps de pacifier la grande route de Vera-Cruz à Mexico. La locomotive qui fait le service dans les terres chaudes de Vera-Cruz est armée de canons et de tirailleurs à cause des guérillas, qui ont déjà causé deux catastrophes par des déraillemens. Les embuscades sont faciles au milieu de la végétation qui envahit la voie elle-même malgré des coupes répétées. Le seul moyen de repousser les bandits, c’est de brûler et de raser les bois à droite et à gauche sur trois ou quatre kilomètres de largeur. Sur ces terrains défrichés et engraissés, appelez des colons ; au lieu d’accorder des concessions fantastiques au fond du Mexique, dans des pays inconnus, groupez les nouvelles populations sur les routes ; fortifiez par des ouvrages de campagne les points les plus favorables : les blockhaus ont longtemps suffi à briser le choc bien autrement redoutable des Arabes.