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qu’était la peinture en Italie à l’heure de sa plus sauvage inertie, nous n’entendons pas confondre dans le même dédain toutes les miniatures exécutées durant la période byzantine ; nous voudrions encore moins accuser en lui-même un procédé qui, sans compter tant de chefs-d’œuvre futurs, avait déjà fait ses preuves, et, mieux que d’autres procédés plus ambitieux, sauvegardé et continué quelque chose des saines traditions. S’il fallait en effet, parmi les témoignages contraires que l’école byzantine nous a légués, retrouver un lointain souvenir du beau, un certain respect pour les exemples antiques, c’est dans les vignettes des manuscrits qu’il conviendrait surtout d’en rechercher les traces. Les miniatures du célèbre Térence et de l’Histoire de Josué conservés dans la bibliothèque du Vatican, celles d’un Virgile faisant partie de la même collection, d’autres monumens analogues appartenant à la bibliothèque de Sainte-Marie de la Minerve et aussi justement appréciés qu’exactement décrits par MM. Crowe et Cavalcaselle, prouvent qu’au VIIIe ou au IXe siècle tout dans l’art n’avait pas disparu du goût et du style antiques, et que quelquefois le pinceau des enlumineurs s’efforçait encore de s’en approprier les élémens. — Mais laissons là cette triste époque et les témoignages qui ont survécu de ses longues erreurs ou de ses velléités archaïques : il est temps de chercher à entrevoir ailleurs l’aube des jours glorieux qui se lèveront pour l’art italien, et de demander à quelques travaux du XIIIe siècle, aux essais des premiers peintres florentins et siennois, mieux que des renseignemens sur les formes de la décadence ; il est temps d’interroger ces tentatives de l’esprit nouveau pour y surprendre la promesse des éclatans progrès qui vont suivre, les commencemens d’une renaissance dans le sens de la vraisemblance pittoresque, des principes antiques et de l’imitation des grands modèles.


II

Et d’abord, il faut bien s’entendre sur la signification de ces deux mots employés en général un peu au hasard et pour les besoins de toutes les causes, — « l’imitation de l’antiquité » et « la renaissance. » Si celui-ci, conformément à l’usage qu’on en fait d’ordinaire, ne devait exprimer que le mouvement d’idées accompli en Italie dans la seconde moitié du XVe siècle, il s’ensuivrait que toutes les entreprises antérieures, tous les chefs-d’œuvre déjà produits, y compris les sculptures de la cathédrale d’Orvieto, les fresques de Giotto et le poème de Dante, appartiennent à une époque de léthargie ou de mort ; il s’ensuivrait que les plus fiers