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dignitaires les plus élevés, comme pour tous les membres inférieurs de la hiérarchie ecclésiastique, une situation honorifique convenable et des traitemens à peu près suffisans.

Rien ne nous choque, hâtons-nous de le dire, dans la préoccupation qu’a montrée le négociateur du saint-siège pour les intérêts matériels du clergé français. On lui avait pris ses biens ; on ne pouvait pas, on ne devait peut-être point, en tout cas on ne voulait pas les lui rendre. Il fallait donc pourvoir à son existence. Le prêtre non plus que l’homme ne vit pas seulement de la parole de Dieu, il vit aussi de pain, car un corps mortel est attaché à son âme, si élevée qu’elle soit. Force était donc de demander pour lui ce pain indispensable, soit à la munificence de l’état, soit à la piété des fidèles. On se conformait, convenons-en, aux idées du temps et à nos mœurs, aux instincts et à la tradition française, en allant le chercher de préférence dans la caisse du gouvernement, sous le titre de traitement officiel, plutôt que dans la bourse des particuliers, sous la forme des rétributions privées et volontaires. En dehors de cet avantage, que nous ne voulons ni grossir ni diminuer, nous ne découvrons plus ce que l’église romaine et le clergé français ont gagné au concordat de 1801. Presque tous les articles contiennent des entraves mises à l’exercice de l’autorité spirituelle du saint-père, des évêques et des prêtres. Leurs rapports avec l’état sont minutieusement réglés avec des précautions infinies, toutes favorables aux représentans du pouvoir civil, et qui impliquent de la part des membres du clergé une subordination déguisée, mais réelle. L’église a-t-elle payé son budget trop cher en l’achetant au prix de l’aliénation d’une partie de son indépendance ? Voilà toute la question ; nous l’indiquons, nous ne la discutons pas. Elle est de celles qu’on hésite à toucher, même en tout respect et de la main la plus délicate. Elle ne sera abordée que de biais dans ce récit et par son côté purement historique. Si l’alliance contractée en 1801 a été réellement bonne en soi, si elle a été surtout profitable à la religion catholique, tout le monde comprend qu’elle a dû porter ses fruits les meilleurs au moment de la publication du concordat et du sacre de l’empereur. Le légat à latere Caprara officiant solennellement à Notre-Dame le jour de Pâques, devant les vieux conventionnels de 93 et les jeunes généraux de l’armée d’Italie, le saint pontife accouru de Rome pour couronner dans sa capitale l’homme extraordinaire qui avait vaincu toutes les résistances et courbé toutes les têtes, peut-on imaginer un gage plus grandiose à la fois et plus touchant de l’accord établi entre les deux pouvoirs ? 1801,1804, quelles dates chères aux partisans de l’alliance intime de l’église et de l’état ! C’est le temps de la lune de miel et pour