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cienne manière de Frédéric II, hâté la conclusion de sa paix avec l’Autriche ; il a négocié non moins diligemment avec les états du sud ; il règle la situation provisoire des états annexés ; il prépare son parlement fédéral. Il a l’œil et la main à tout, et nous donne des exemples de vigilance et d’activité qui mériteraient de trouver non-seulement des approbateurs, mais des imitateurs.

L’œuvre de la pacification touche au dernier acte, puisque le général Menabrea, l’honorable négociateur italien, est enfin arrivé à Vienne. La cour d’Autriche, en consentant à une négociation directe avec l’Italie, a fait enfin acte une fois de sens et d’habileté. Ce sera un événement très important pour l’Italie que le rétablissement des relations entre son gouvernement et celui de l’Autriche. Les destinées de l’Italie cesseront d’être embarrassées par une hostilité obstinée. Libre désormais à l’égard de l’Autriche, n’ayant plus rien à lui réclamer et rien à craindre d’elle, l’Italie pourra s’affranchir bientôt des charges que lui imposait un établissement militaire trop lourd pour ses ressources. La cour de Vienne paraît d’ailleurs entrer dans des idées sincères de réconciliation avec l’Italie, et les concessions auxquelles cette cour semble décidée à propos du lac de Garde feront disparaître les derniers nuages entre les deux pays. Voilà donc l’œuvre de l’unité italienne terminée ; voilà enfin une entreprise puissamment aidée par la France qui a l’apparence de réussir. Ne croyons point par mauvaise humeur aux pronostics de ceux qui ont blâmé parmi nous l’aide que nous avons donnée à l’émancipation italienne. Ne laissons point dire qu’en agissant ainsi la France a suscité à ses portes une puissance destinée à lui être hostile. Sans doute ce serait une pensée impolitique et un faux calcul de méconnaître l’indépendance de l’Italie, et d’exiger d’elle avec une inquiétude chagrine des offices de vassalité. — Nous avons aidé à faire de l’Italie un peuple libre, et aujourd’hui une puissance qui a le droit de tenir en Europe une grande place. Nous frapperions notre propre ouvrage de stérilité, si nous avions la prétention de lui imposer la reconnaissance comme un fardeau : l’adresse est ici d’accord avec la générosité ; elle nous conseille de traiter l’Italie avec les égards que commande la grande situation qu’elle a réussi à se faire avec notre concours. Entre elle et nous, il y a des liens nombreux d’intérêt et de commune civilisation, liens qui ne pourront que se resserrer davantage à mesure que la France avancera vers la liberté. Cette communauté d’intérêts apparaîtrait surtout, et nous serait certainement profitable, si une crise de l’empire turc ramenait vers la question d’Orient l’action de la politique européenne.

Malgré le parti-pris des cabinets européens de prolonger autant que possible les jours de l’empire ottoman, malgré le peu de ressources que les populations chrétiennes d’Orient offrent à une régénération qui pourrait être secondée par les peuples désintéressés de l’Europe, on ne doit pas se dissimuler que le travail de décomposition ne s’arrête point dans l’empire