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LA GUERRE
LA TELEGRAPHIE ELECTRIQUE
ET
LES CHEMINS DE FER

L’art de la guerre subit de constantes modifications en rapport avec le progrès scientifique et industriel. Les moyens de défense et d’attaque, les armés sur terre et sur mer changent, se renouvellent sans cesse, à mesure que la science multiplie ses découvertes et que l’industrie en élargit les applications.

En effet, il n’y a plus de présomption à l’affirmer maintenant, le premier moyen d’assurer la victoire est de prévenir l’ennemi dans la mise en œuvre de forces nouvelles ou d’engins inusités. Le général qui disposera de canons rayés avant son adversaire n’éprouvera pas de difficultés à se mesurer avec lui sur un champ de bataille que ce dernier aura étudié d’avance. Le pays qui le premier construira des navires cuirassés défiera les vaisseaux de bois du monde entier. L’infanterie qu’un nouveau fusil mettra en mesure de décimer de feux redoublés l’ennemi qu’elle a devant elle, avant qu’il puisse recharger ses armes ou attaquer à la baïonnette, ne connaîtra pas d’obstacle et enlèvera la victoire au pas de charge.

Prévenir l’ennemi, c’est le point essentiel, car, s’il est clair qu’il serait aussi inutile à une batterie d’anciennes bouches à feu de répondre à une batterie rayée qu’au vaisseau de bois le mieux armé de tenir tête au moindre monitor muni d’une pièce de gros calibre, qu’aux anciens fusils de riposter aux armes nouvelles se chargeant par la culasse ; s’il est incontestable que ni l’adresse, ni le courage, ni l’expérience, ni la supériorité numérique ne peuvent rien contre cette autre supériorité brutale, écrasante, due à l’emploi d’un nouveau mécanisme ou d’une découverte chimique ou