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On ne saurait trop le répéter, l’act de 1844 n’a été pour rien dans la dernière crise ; il a au contraire servi à relever énergiquement les affaires et à ramener une situation plus régulière.

Un seul point reste à débattre : la loi ne devrait-elle pas prévoir le cas et poser les conditions d’une suspension de l’act ? En outre, une fois la suspension prononcée, la limite du minimum d’intérêt qu’elle fixe doit-elle demeurer invariable tant que l’effet de cette mesure exceptionnelle n’est pas épuisé ? Tout se borne à l’étude de ces dispositions secondaires : quant au principe de l’act, il demeure debout, au grand avantage de la sécurité commerciale, de la sincérité des transactions et de la liberté des échanges. Le temps n’est pas loin, et la dernière expérience servira à le rapprocher, où l’on ne s’étonnera plus que d’une chose, c’est qu’on ait si longtemps méconnu la nécessité d’assujettir à une limitation précise l’émission du billet faisant office de monnaie, et qu’on ait hésité à reconnaître dans l’émission elle-même un attribut de l’état. Il s’est passé quelque chose d’analogue pour le free-trade et pour les lois sur l’intérêt. Notre temps aura la gloire d’avoir résolu ces trois questions d’une si grande importance en ce qui concerne le développement de la richesse et la garantie des rapports équitables.

Nous ne saurions mieux résumer notre pensée qu’en empruntant à un partisan déterminé de la liberté dans toutes les acceptions sérieuses du mot, M. Prince-Smith, les lignes suivantes : « La convertibilité du billet est une garantie contre l’excès permanent de l’émission, contre une dépréciation extrême. Néanmoins elle n’empêche pas qu’on ne dépasse temporairement la limite des besoins sérieux de la circulation, limite dans laquelle on ne rentre qu’à travers une série de crises. Aussi une bonne organisation de la monnaie de papier exige-t-elle non-seulement l’assurance d’une prompte convertibilité, mais encore la fixation de la quotité. » Appuyée sur la base solide du système de 1844, qui ne permet de représenter en papier que la portion stable de la circulation, en exigeant que la portion variable soit en or ou en papier gagé par de l’or, la liberté des banques, pleine et entière pour tout ce qui constitue l’office de banque, fonctionne en Angleterre sur une immense échelle, sans recourir à aucune création de billet faisant office de monnaie. Sir Robert Peel a la gloire de l’avoir fondée, comme celle d’avoir établi le free-trade.


L. WOLOWSKI, de l’Institut.