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VENISE ET L’ITALIE

I. Documens et Pièces authentiques laissés par Daniel Manin, traduits et annotés par M. Planat de La Faye, 2 vol. in-8o. — II. Daniel Manin, par M. Henri Martin. — III. Lettere di Daniele Manin, con note e documenti sulla quistione italiana, 1 vol. in-18. — IV. La Vénétie en 1864, 1 vol. in-8o, etc.

Les prodiges de la force ont cela de caractéristique et presque de rassurant que seuls, réduits à eux-mêmes, ils ne tromperaient pas longtemps la conscience humaine. Ils ont besoin, pour se relever et s’ennoblir, d’appeler à leur aide quelque grande idée sous laquelle ils s’abritent, quelque cause généreuse dont ils se font une alliée, quelque droit méconnu qu’ils traînent à leur char de triomphe. L’idée morale, le droit en souffrance dans la guerre qui finit, c’est Venise. C’est ce prestige d’une population captive qui un moment a fait passer sur tout le reste et a rejailli jusque sur la Prusse elle-même. C’est à cause de Venise que l’Italie a pu mettre sa main dans une main allemande et signer un pacte imprévu avec une puissance qui naguère encore, lorsqu’elle n’avait pas été subitement éclairée par son ambition, était la première à lui disputer son affranchissement et ses frontières. C’est Venise qui a ruiné la cause de l’Autriche, qui l’a ruinée doublement, en disséminant ses forces et en détournant d’elle toute sympathie libérale. De bonne foi, s’il n’y avait eu Venise, la conscience universelle, la conscience française surtout n’eût-elle pas ressenti d’autres impressions ? Elle serait restée froide peut-être devant ces combattans d’Allemagne alliés de la veille dans la guerre de Danemark ; peut-être eût-elle hésité, et si à tout prix elle avait dû faire un choix, elle ne se