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l’intersécance est toujours observé ! comme les repos sont heureux et les lignes horizontales habilement scandées ! Ces hautes coupures, qui divisent les murs afin de détruire l’uniformité sans déranger la symétrie, sont des chefs-d’œuvre de goût et de grandeur. Cet art a su enfin résumer en lui l’ensemble des ressources architecturales, dont les autres civilisations, égyptienne, grecque ou romaine, n’avaient saisi qu’un détail.

Les historiens arabes, Makary, Condé, Murphy, Okley, Aboulféda, Makrizy et tant d’autres, sont là pour nous édifier sur la splendeur du moyen âge oriental, si nous n’en avions pas jugé nous-même par tout ce qu’on en voit encore. La mosquée de Tabriz, aujourd’hui ruinée en grande partie, est un des beaux exemples de la perfection du style persan. Elle est entièrement revêtue en dehors comme en dedans d’une robe d’émail, et il est difficile de rien imaginer de plus beau que la décoration de ces salles. La première, ornée de faïences bleu-turquoise sur lesquelles courent des arabesques d’or entrelacées de fleurs blanches, vertes et noires, est divisée par panneaux jusqu’aux frises, formées d’inscriptions blanches et or sur fond lapis, parfaits modèles de la calligraphie persane. La deuxième salle est en émail, azur et or, d’un travail merveilleux. Autour du sanctuaire règne une plinthe en albâtre fleuri. Ce marbre transparent et orangé remplace aussi les vitraux des fenêtres, et jette, lorsque le soleil les frappe, des reflets rosés d’un effet charmant. Le travail et l’exécution de ces faïences sont les modèles du genre. Chaque brique a été moulée de façon à recevoir les différens tons des émaux dans l’enceinte cloisonnée qui leur est réservée ; les arabesques des dômes au contraire étaient en relief sur le fond.

Le medresseh ou collège de schah-sultan Hussein, à Ispahan, est encore un des monumens qui méritent une description. C’est ce que l’imagination peut rêver de plus parfait, autant par, la grâce pittoresque que par la pureté des lignes. Rien au Caire, la ville orientale entre toutes, ne peut lui être comparé. Construit sur le plan si simple des mosquées et des karavan-seraï, c’est-à-dire sous forme d’un carré long entouré d’arcades avec le bassin des ablutions au centre, il est exquis dans toutes ses proportions. Au milieu des quatre galeries s’élèvent quatre portes monumentales ; l’une, en argent ciselé d’un dessin splendide, sert d’entrée à la mosquée, les trois autres ouvrent sur les salles d’étude. Ces galeries sont à double étage : en bas les portiques, en haut les logemens des étudians. Des faïences à grandes arabesques fleuries émaillent la coupole et ornent les arcades, qui affectent cette belle forme de l’ogive droite, l’arc persan par excellence. Sur la voûte d’entrée de