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dont les restes couronnent les îles et servent de base aux continens de formation nouvelle. Chaque organe jouit dans ce vaste ensemble d’une vie à part, chacun d’eux peut avoir une respiration distincte et une espèce de circulation spéciale ; il n’est pas jusqu’à la dernière cellule qui ne s’isole de l’existence générale par des phénomènes physiologiques qui lui sont propres.

Toutefois n’exagérons rien, et ne scindons point par une analyse excessive les grandes et merveilleuses synthèses que la nature maintient avec un soin jaloux. Distinguons dans le polypier végétal ce que l’organographie nous autorise à distinguer, mais n’oublions pas qu’une vie commune anime la confédération tout entière. Au travers de ces tissus annuellement accumulés par chaque assise périodique, il se fait un appel général de fluides ou de sucs et comme une vibration harmonique, mettant en œuvre toutes les lois physiques qui, sous les noms généraux de pesanteur, d’attraction, de capillarité, d’endosmose et de dynamique vitale, cachent les admirables mystères dont s’occupe la physiologie. Si donc l’unité manque au point de vue de l’organisme général, elle demeure entière en ce qui concerne l’équilibre des forces et la solidarité des élémens vitaux. Ceux-ci concourent tous à la nutrition comme à la reproduction de la plante, et depuis la racine, qui fournit les véhicules aqueux et les alimens minéraux, jusqu’aux feuilles, où s’opère, par une véritable respiration, la transformation chimique des fluides aériformes, s’accomplissent incessamment les phénomènes généraux de la vie agglomérée.


I.

Un gland est tombé à terre il y a cinq cents ans environ. Jeté par un coup de vent dans la poussière, il y attendit quelque temps la pluie, puis un rayon de soleil. La pluie tomba, les rayons percèrent les nuages, et, dans la fange tiède où l’avait enseveli le pied distrait d’un passant ou le coup de bec d’un oiseau, commencèrent une série de phénomènes curieux entre tous, ceux de la germination.

Il s’offre ici un premier sujet de réflexion. Les origines de la vie, partout inconnues, incompréhensibles, nous attirent par le mystère même dont elles s’enveloppent. L’œuf, la graine, plus haut encore la cellule, cet élément primaire de tout être vivant, retiennent penchés sur l’énigme de leur nature le poète, le savant et le philosophe. À quelque école que l’on appartienne, quelque système que l’on adopte, il est, dans la transition de la préexistence embryonnaire à la naissance ou vie formulée, un abîme de questions auxquelles la science ne peut répondre ; elle a fait néanmoins une dé-