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obligé entre la France et l’Algérie, à l’aide de transports périodiques confiés à une compagnie privée au prix d’une modique subvention, magasin général de notre nouvelle colonie où 100 millions étaient dépensés chaque année et 100,000 soldats entretenus, le port de Marseille avait, il y a vingt ans, repris possession du rôle que le génie expansif de ses fondateurs lui avait assigné aux premiers jours de son histoire. Le nombre des habitans, qui était de 96,271 en 1811, s’était élevé en 1846 à 183,000 ; de 2,221,000 francs en 1810, le produit des douanes avait atteint en 1845 le chiffre de 36 millions ; en six années seulement, de 1839 à 1845, le mouvement du port passait de 1,200,000 tonneaux à 2 millions de tonneaux. De tels progrès, à coup sûr, justifiaient bien des espérances : les plus grandes ont été dépassées ; c’est un véritable changement à vue que Marseille a réalisé dans ce court espace de vingt années. Par un de ces mouvemens d’expansion dont les États-Unis d’Amérique semblaient seuls avoir le privilège, elle s’est transformée sous tous les rapports, ou plutôt une création toute nouvelle a surgi comme par enchantement, et s’est opérée dans des conditions de virilité politique et sociale, de vigueur commerciale et industrielle, d’esprit libéral et progressif, que nous allons nous efforcer de mettre en lumière.

Aujourd’hui Marseille renferme une population de 300,000 âmes et a déjà bâti des quartiers prêts à en recevoir 100,000 de plus. Ce n’est pas à des étrangers attirés par les plaisirs des grandes villes, à des ouvriers nomades alléchés par les gros salaires de travaux temporaires, que cette agglomération doit exclusivement se rapporter. En dehors de la population sans cesse accrue qui s’attache d’une manière durable aux travaux du port, les besoins renaissans de l’industrie ont appelé et retiennent chaque jour un plus grand nombre de bras. Le territoire communal s’est couvert d’usines de tout genre : manufactures de savon, de produits chimiques, minoteries, verreries, huileries, hauts-fourneaux, qui donnent sur la terre l’image du mouvement qui règne sur la mer. Partout les cheminées fument, la vapeur siffle, et ce paysage, il y a si peu d’années encore sec, aride et morne, s’emplit des rumeurs d’un peuple laborieux. Ici ce n’est pas la ville qui a dépeuplé la plaine ; au contraire, la cité a fourni des masses d’ouvriers sédentaires aux champs qui ne retenaient jadis aucun cultivateur. Après l’industrie proprement dite, la culture du sol est venue, ou plutôt l’eau de la Durance, amenée à travers les rochers, a créé un sol et fait une campagne. Le progrès commercial a encore été plus rapide. Le mouvement du port dépasse aujourd’hui 3 millions 1/2 de tonnes, c’est-à-dire qu’il a sextuplé. Depuis 1862 cependant, il semble que l’on soit arrivé