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mens irrécusables. Ce ne serait cependant pas une raison pour qu’ils ne rencontrassent pas d’incrédules. Qui sait? L’envie et la légèreté humaines sont susceptibles de tant de singularités!

J’ai reçu de deux conventionnels dont l’un est Courtois, toutes, ou très peu s’en faut, les pièces que je possède de Louis XVI, et particulièrement le manifeste autographe laissé par ce prince en partant pour Varennes, document paraphé sur toutes les pages par le marquis de Beauharnais, alors président de la constituante. D’eux je tiens encore quelques lettres de la reine à Mme de Lamballe, quelques autres à Léopold II, lettres interceptées et peut-être écrites pour qu’elles eussent ce sort, enfin des papiers de Vermond trouvés dans une cachette en une maison qu’il avait habitée à Bielle[1]. A une vente amiable de l’expert Charon, qui était fort habile connaisseur, j’ai trouvé à Paris la lettre de Marie-Antoinette à sa mère, en date du 14 juin 1771, dont j’ai donné en mon troisième volume un fac-simile, qui malheureusement est loin d’en rendre exactement la physionomie, mon éditeur ayant hésité, à cause des frais, à reproduire en son tirage la vignette coloriée qui entoure la feuille. Ce n’est plus à Paris que j’ai acheté l’autre lettre, de même papier vergé, également encadrée, datée du 20 novembre même année, et dont on a aussi, en ce troisième volume, le fac-simile, incomplet comme le précédent; ce n’est pas à Paris, dis-je, c’est à Vienne en Autriche, lors de mon premier voyage, chez un de ces bouquinistes qu’on appelle antiquaires, et qui demeurait tout près de la rue de Carinthie. Enfin c’est chez ce vieil antiquaire que j’ai trouvé, avec leurs enveloppes revêtues du sceau aux armes accouplées de France et d’Autriche, des lettres de la reine à son frère Léopold II et au comte de Mercy, avec une lettre de Louis XVI à l’empereur, scellée à lacs de soie bleue, et un énorme paquet des plus précieuses pièces de princes, d’hommes politiques, d’écrivains ou d’artistes du XVIe siècle, provenant d’Espagne.


III.

La question de la nature et du format du papier des lettres de Marie-Antoinette est un point dont l’étude est des plus essentielles pour arriver à la démonstration de l’authenticité des pièces discutées. L’espace nous manque ici : nous épuiserons la question ailleurs.

La question de l’écriture n’est pas aussi facile à trancher qu’on le suppose, et les lettres ne fussent-elles pas toujours d’une iden-

  1. A 25 kilomètres d’Oloron, dans les Basses-Pyrénées.