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coins de l’île du Nord, mais sans résultat. Les indigènes, dont la cupidité s’était allumée lorsqu’ils virent de nombreux amateurs fouiller le sol pour en retirer les os de moa, avaient soigneusement recueilli tout ce qui en restait et l’avaient vendu aussi cher qu’ils avaient pu. Le seul débris sur lequel le naturaliste autrichien put mettre la main, c’étaient deux os qu’un vieux chef de Touhouas consentit à retirer d’un coin de sa cabane où il les cachait depuis longtemps. Après d’interminables négociations, il les céda pour une couverture de laine et un peu d’argent. Ce trésor se composait d’un petit bassin et d’un tibia enfumé qui avait probablement servi de massue. M. d’Hochstetter résolut alors de visiter l’île du Milieu. Dans la province de Nelson, il apprit par les gold-diggers (chercheurs d’or) l’existence d’une caverne où l’on venait de découvrir le squelette à peu près complet d’un oiseau de grande taille, et qui, disaient-ils, devait encore renfermer une grande quantité d’os isolés. M. d’Hochstetter s’empressa de s’y faire conduire, et il eut bientôt la satisfaction de retirer des os de moa du sol argileux de la caverne. Aussitôt il organisa dans le même endroit des fouilles plus sérieuses ; mais, ne pouvant y prolonger son séjour à cause des recherches qu’il avait encore à faire dans les champs aurifères et les houillères de cette contrée, il confia la direction des fouilles à deux de ses compagnons, MM, Haast et Maling. On se donna rendez-vous dans la ville de Collingwood, qui est située sur la côte de l’île.

Au bout de trois jours, M. d’Hochstetter vit en effet arriver ses moa-(liggers avec un convoi de bœufs tout fleuris et pomponnés qui portaient une charge considérable d’ossemens fossiles, et qui mirent en émoi toute la population de la petite ville. M. Haast avait découvert deux nouvelles cavernes, et la collection qu’il avait réunie contenait les squelettes plus ou moins complets d’une dizaine d’individus appartenant à six ou sept espèces différentes.

L’un de ces squelettes, qui ont été rapportés à Vienne, est très complet. Il appartient à un jeune oiseau de l’espèce palapteryx ingens, dont on n’avait encore jusque-là que des rudimens. Sa hauteur est de deux mètres, c’est la taille moyenne de l’autruche ; mais l’oiseau adulte a dû être plus grand. Le palapteryx avait quatre doigts, comme les échassiers. Il se distingue de l’autruche surtout par un bassin ouvert et par la solidité de ses extrémités postérieures. La conformation de l’appareil sternal montre qu’il ne pouvait avoir que des ailes tout à fait rudimentaires.

Il y a deux ans, une trouvaille encore plus intéressante a été faite par es chercheurs d’or, près de Dunedin, dans la Nouvelle-Zélande. Ils ont découvert, dans le sable mouvant de la côte, un squelette de moa presque complet auquel adhéraient encore des cartilages, des ligamens et des tendons, dans un état de conservation assez parfaite. L’oiseau devait être mort dans son nid, car ses ossemens couvraient ceux de la couvée. D’après M. Huxley, à qui on a soumis ces débris, le moa ne devait être mort que