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d’eau, l’acide carbonique, l’azote et les gaz combustibles restaient comme les derniers signes de la vitalité du volcan.

Une éruption complète présente donc quatre périodes distinctes, pendant chacune desquelles prédominent des substances différentes parmi les matières volatilisées. Dans une même éruption, au moment de la plus grande intensité des phénomènes, on peut encore observer tous ces produits rangés dans un ordre méthodique à partir du foyer principal d’émission, les sels qui caractérisent la première période se rencontrant près des bouches des cratères, ceux de la seconde à une certaine distance, en des points où la température s’est déjà notablement abaissée, ceux de la troisième au-delà de ceux-ci, et ceux de la quatrième plus loin encore. Tels sont les faits remarquables fournis par l’examen des volcans terrestres. Or dans une éruption sous-marine, comme celle de Santorin, les mêmes produits s’observent encore et exactement dans le même ordre. La seule différence que l’on constate consiste dans l’étendue moindre du champ de l’éruption. À Santorin, les produits des quatre périodes, au lieu d’être échelonnés sur une longueur de plusieurs lieues, comme cela s’observe par exemple à l’Etna, sont fort rapprochés, et prédominent successivement dans un espace de moins d’un kilomètre. Tout s’y trouve resserré dans un étroit intervalle ; mais il est évident que cela ne constitue qu’une différence d’ordre secondaire. La loi découverte par M. Ch. Sainte-Claire Deville est donc une loi générale.

Est-elle vraie cependant dans le sens rigoureusement absolu qu’on lui a d’abord donné ? Les différens produits apparaissent-ils les uns après les autres en se succédant ? Un élément nouveau vient-il remplacer chaque fois un élément disparu ? C’est ce que l’étude des faits ne semble pas justifier. Voici comment les choses se passent en réalité : au début, quand un volcan est en pleine activité, les produits de toutes les périodes se montrent simultanément ; mais les sels de soude et de potasse, n’étant volatils qu’au rouge, et par suite ne se rencontrant pas à une température plus basse, permettent de distinguer une première période à laquelle ils sont propres. Quand la température vient à s’abaisser au-dessous du rouge tout en restant fort élevée, nous trouvons encore en abondance les chlorures de fer, l’acide chlorhydrique, l’acide sulfureux, qui manquent aux températures inférieures ; dès lors nous les regardons comme caractéristiques de la seconde période, bien qu’ils y soient accompagnés par toutes les matières volatiles des périodes ultimes, et ainsi de suite. Nous caractérisons donc ainsi chaque phase du mouvement éruptif par certains produits, non parce qu’ils y existent seuls, mais parce qu’ils manquent dans les périodes suivantes, pendant lesquelles la température n’est plus assez haute pour amener soit la volatilisation de ces corps, soit la production des réactions chimiques qui leur donnent naissance. L’éruption actuelle de Santorin permet d’apporter des argumens décisifs en faveur de cette manière d’interpréter la loi de M. Ch. Sainte-Claire Deville, car on a pu y