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LES REFORMES
ET
LA VIE DES PRISONS
EN ANGLETERRE ET EN IRLANDE

I. Our Convicts, by Mary Carpenter ; two vols. Longman, London 1864. — II. Female Life in Prison, by a Prison Matron, third ed., Hurst and Blackett, London 1863. — III. Memoirs of Jane Cameron, female Convict, by the same, Hurst and Blackett, London 1864.


I. — ÉTAT DE LA QUESTION PENITENTIAIRE.

Un célèbre chimiste mesurait la civilisation d’un peuple à la quantité d’acide sulfurique absorbée par ses opérations industrielles. Pour la même évaluation, les métallurgistes se régleraient volontiers, ils l’ont dit ouvertement, sur la quantité de fer consommée d’un bout de l’année à l’autre. Nous adopterions plus volontiers un autre critérium, et il nous semble que le progrès moral d’une nation se doit calculer en raison directe de ce que sa conscience collective a perdu d’inflexible rigueur, de partis-pris cruels, d’inexorable et inintelligente sévérité. Le sauvage, non content d’immoler son ennemi captif, lui inflige à loisir le plus lent et le plus cruel supplice. Le civilisé moderne traite ses prisonniers de guerre en hôtes, presque sacrés, et met son orgueil à les relever de l’humiliation où les a réduits leur défaite. Il obéit en ceci aux nobles inspirations d’une conscience éclairée qui lutte contre les instincts primitifs, les domine et les transforme. Il obéit en même