Mais… par votre cousine…
Gabrielle !… Elle est ici ?…
Ne le saviez-vous pas ?
Ma foi : je l’avais complètement oublié.
Vraiment ?
Et elle vous parle souvent de moi ?
Toutes les fois que nous sommes seules.
Sait-elle que je l’ai refusée ?
Oui.
M’en veut-elle ?
Beaucoup…
Cette chère cousine !
Qu’aviez-vous donc à lui reprocher ?
Absolument rien. Nous avions été élevés ensemble au château de notre oncle de Blançay, qui déjà, à cette époque, nous disait en nous regardant manger nos tartines de confitures : « Mes enfans, vous vous marierez ensemble, c’est entendu ; Gabrielle, voici ton mari ! Tristan, voilà ta femme ! » Et moi, ça m’agaçait, ça m’irritait qu’il eût disposé de moi avant moi-même. Un beau jour on nous sépara, elle avait cinq ans, moi dix. J’entrai au collège, je fis mes études, et mes études terminées je cherchai une carrière ; j’étais avocat. C’est alors que notre oncle me dit : « Eh bien ! mon garçon, voici le moment d’épouser ta cousine ; avoir une femme et des enfans, c’est une carrière qui en vaut bien une autre ! » Ma foil je n’y tins plus ! « Non ! mon oncle, m’écriai-je, il ne sera pas dit que l’on me mariera sans ma volonté ; je n’épouserai jamais ma cousine Gabrielle. » Là-dessus, mon oncle m’envoya promener ; je me fis soldat, et je partis pour l’Afrique.
Vous n’avez jamais revu votre cousine ?