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plus probablement que de Mantegna, à qui il est également attribué, — enfin une tête de saint Jean, très authentique, d’Andréa Solario : tels sont, en dehors de l’école florentine, quelques-uns des tableaux italiens les plus dignes, selon nous, d’attirer l’attention.

Est-ce assez toutefois, et, quelque reconnaissance que l’on doive aux amateurs qui ont consenti à nous fournir sur ce point des élémens d’étude, faut-il se tenir pour satisfait d’une représentation de l’art italien aussi insuffisante à tant d’égards, aussi incomplète ? Même dans des travaux d’un ordre moins élevé et d’une date moins ancienne, trouvera-t-on des informations plus nombreuses ou plus sûres ? A l’exception d’un portrait à mi-corps de Jean de Carondelet que l’on croit de la main d’Holbein, qui, en tout cas, est un admirable ouvrage, à l’exception encore d’un portrait de femme attribué au même peintre et de quelques tableaux diversement remarquables des petits maîtres hollandais ou flamands, ce que la salle du palais des Champs-Elysées nous apprend des écoles du nord au XVIe et au XVIIe siècle ne semble pas de nature à ajouter beaucoup à la gloire de celles-ci. Comment, à plus forte raison, nous contenter de la maigre part faite à notre vieille école nationale et aux talens qui en soutiendraient le mieux l’honneur ? Quoi ! deux ou trois petits portraits, charmans à la vérité, mais moins caractéristiques au point de vue de la manière que tels autres portraits contemporains, — voilà tout ce qu’on a pu réunir pour nous rappeler ou nous révéler l’habileté si sensée, la bonne foi si finement intelligente des Clouet et de leurs disciples ! Voilà tout ce qui nous parle de cet art français du XVIe siècle, aux aptitudes et à la physionomie si particulières qu’on en chercherait vainement l’équivalent dans les écoles étrangères les mieux famées ! Quoi ! pas un tableau de Poussin, pas un tableau de Claude, pour consacrer au moins le souvenir du plus grand peintre d’histoire et du plus grand paysagiste que notre pays ait vus naître ! Ce sont là des lacunes d’autant plus fâcheuses qu’une bien large place, nous l’avons dit, a été accordée à des peintures à peine secondaires, et que, dans cette exposition rétrospective où tant de maîtres anciens ne figurent pas, on ne compte pas moins de cinquante ou soixante toiles appartenant à l’époque qui s’est écoulée depuis la seconde moitié du dernier siècle jusqu’à la veille des jours où nous vivons[1].

Il serait assez inutile au surplus d’insister, puisque les regrets que nous

  1. Depuis quelques jours, l’exposition rétrospective s’est enrichie d’un certain nombre de tableaux faisant partie de la collection particulière de l’impératrice et de quelques autres collections importantes. Plusieurs de ces tableaux, à n’en considérer que les mérites purement pittoresques, auraient sans doute exigé une mention. Toutefois, comme ils appartiennent pour la plupart à l’école des petits maîtres hollandais ou flamands, ou à l’école française du XVIIIe siècle, ils ne sauraient, quant au fond, démentir ce que nous avons dit du caractère général des œuvres primitivement réunies et de la part trop large faite, dans cette exposition, à la peinture de genre et aux talens secondaires.