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tiennent à le conserver comme village africain, qu’ils le placent sous les 15° 37′ 22″ de latitude sud et le 28° 12′ de longitude est.

La rive droite du Zambèse est riche en minerais de fer, et les sources y roulent des paillettes d’or ; le district de Chiowa a la réputation de renfermer des mines d’argent ; cependant Livingstone ne découvrit pas trace de ce précieux métal. Le sol était dans de certaines places couvert de tronçons d’arbres fossiles, les uns debout et d’autres couchés. Un de ces arbres avait quatre pieds huit pouces de diamètre ; le bois en avait dû être très tendre, car il ne comptait que six cernes dans un pouce, ce qui lui donnait cent soixante-huit ans. Il trouva aussi des fragmens de palmier convertis en oxyde de fer, et dont les pores étaient remplis de silice pure. Ces arbres fossiles s’enfonçaient dans un grès tendre qui renferme des bancs de cailloux roulés. Ce grès forme le sous-sol rocheux de toute la contrée qui s’étend du Zambèse jusqu’aux gorges de Lupata, sur un espace de cent lieues, et se trouve identique à celui que l’on rencontre dans les zones correspondantes de l’ouest. Dans un endroit où le rocher a été violemment soulevé par un mouvement turgescent de l’intérieur, il découvrit une mince couche de houille sous un banc de galets.

Bien que le docteur s’approchât des établissemens européens, le pays conservait son caractère sauvage. Les hyènes tigrées y étaient en si grand nombre que les habitans avaient été contraints de construire leurs huttes sur un échafaudage ; ces hyènes sautent sur les personnes endormies et leur déchirent le visage : un des hommes de la troupe avait perdu de cette manière la lèvre supérieure. Le 3 mars 1856, le docteur arrivait à Tété, premier établissement portugais du Mozambique, et remit la lettre de l’évêque de Saint-Paul-de-Loanda au commandant de la place, le major Sicart. Cet officier lui fit le meilleur accueil, le reçut dans sa maison et prit soin de ses compagnons de voyage. La ville de Tété est bâtie sur le penchant d’une colline dont le Zambèse baigne le pied. Son fort, dans lequel se trouvent quelques canons en assez bon état, la protège contre les attaques des indigènes. Elle pourrait contenir quatre mille habitans, mais elle n’en a que la moitié, et dans ce nombre on ne compte que vingt Portugais. Pendant une période assez longue, cette colonie était une source de richesses pour la mère-patrie ; elle lui expédiait une grande variété de grains, du café, du sucre ; de l’huile, de l’indigo, de l’ivoire et de la poudre d’or ; mais les causes qui ont arrêté les développemens des colonies portugaises de l’ouest ont agi avec plus de puissance sur celles de l’est. La traite surtout, dont les bénéfices étaient énormes, a porté un coup fatal à l’agriculture, et a rendu les naturels défians et cruels. À plusieurs reprises, ils ont cherché à expulser les étrangers