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que se trouve le désert de Kalihari, mais il ne faudrait pas conclure du mot désert que le pays soit aride : la terre s’y couvre d’une herbe serrée, dure, résistante, substantielle, qui peut nourrir de nombreux troupeaux. Comme la couche supérieure repose sur un sous-sol imperméable, l’eau qu’elle reçoit ou qu’elle soutire des rivières reste comme une nappe à quelques pieds de profondeur et entretient une humidité favorable à la végétation.

Ces trois zones, en s’avançant vers le nord, s’élargissent et forment un éventail à demi ouvert. Celle de l’ouest prend la même physionomie orographique que la zone orientale et les mêmes caractères géologiques ; celle du milieu s’élève graduellement. Il résulte de cette disposition que l’Afrique centrale est un vaste plateau qui présente vers la ligne médiane une dépression régulière, et dont les parois s’adossent à un large cordon de montagnes qui mesure dans les points culminans 5,000 pieds d’altitude. Le capitaine Speke avait déjà signalé l’existence de ce plateau et comparé l’Afrique trans-équatoriale à une assiette renversée dont le centre serait légèrement concave. La dépression de ce plateau en explique le caractère hydrographique : il renferme un ensemble de lacs de toutes dimensions, depuis le Grand-Nyanza, dont les côtés mesurent près de 350 kilomètres de longueur, jusqu’au Cumadan, qui ne compte que 3 ou 4 kilomètres carrés de surface. De nombreux cours d’eau, qui se jouent à l’aise dans ces espaces immenses, recueillent les tributs d’innombrables affluens, et se transforment en de larges artères pour se précipiter enfin vers la mer, les uns à l’est, les autres à l’ouest. On rencontre à chaque pas des vestiges ichthyologiques et conchyliologiques qui témoignent que ce vaste bassin a été jadis une mer méditerranée, et qu’il doit sa disposition actuelle à un soulèvement du sol qui a déterminé l’écoulement des eaux. Ce bassin pourrait bien perdre un jour le caractère que son origine maritime lui a laissé, car l’Afrique australe est soumise à un travail d’assèchement des plus actifs. Les lacs qui se trouvent au sud du Zambèse sont peu profonds, et, au dire des naturels, cette profondeur diminue chaque année. Le Kalihari est sillonné de lits d’anciennes rivières, et l’on y rencontre de nombreux étangs d’eau saumâtre qui ne sont autre chose que des restes de lacs en train de disparaître. Le pays est en outre traversé par des plaines d’une étendue parfois considérable, — puisque l’une d’elles mesure plus de 40 kilomètres de longueur, — légèrement concaves et couvertes d’une couche de 3 ou 4 centimètres de sel, saupoudrée d’une efflorescence de chaux. Ce travail d’assèchement devra être vigoureusement combattu quand la civilisation se sera définitivement emparée de ces belles contrées.

Considérée au point de vue ethnographique, l’Afrique présente