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que nous avons indiqué. Le projet de loi propose encore d’augmenter cette dotation d’une somme de 6 millions à provenir des aliénations des forêts et coupes de bois extraordinaires, ce qui porterait dès à présent à 26 millions les ressources de l’amortissement.

On peut faire à ce projet deux sortes d’objections : une objection de principe et une objection de forme. L’objection de principe consiste à dire qu’on est en présence d’engagemens pris vis-à-vis des-créanciers de l’état, qu’on n’a pas le droit de les modifier. Nous avons déjà examiné cette objection, elle ne peut pas nous arrêter longtemps. La dotation aujourd’hui, telle qu’elle a été établie par la loi de 1816, serait de 122 millions. Propose-t-on de rétablir l’amortissement jusqu’à concurrence de cette somme ? Car il ne faut rien moins que cela pour remplir l’engagement de 1816, si tant est qu’il y ait eu par cette loi un engagement absolu, inviolable, pris vis-à-vis des créanciers de l’état. Il faut chaque année, coûte que coûte, consacrer 122 millions à l’amortissement, quelles que soient nos ressources, quel que soit l’état du budget, dût-on les demander à l’impôt. Personne n’ose aller jusque-là ; on sent très bien qu’il y aurait dans les conditions actuelles dommage excessif à consacrer chaque année 122 millions à l’amortissement, et même que, si nous avions une pareille somme disponible, il serait infiniment préférable d’en affecter une partie, la plus grande, soit à diminuer les impôts, soit à faire de grands travaux d’utilité publique. Et si on ne va pas jusque-là, c’est qu’on n’est pas en présence d’un engagement absolu qui ne puisse être modifié, et du moment qu’il peut être modifié, la question de principe disparaît, et il ne s’agit plus, je le répète, que d’examiner si par les modifications qu’on propose on améliore ou on empire la situation du créancier de l’état. À ce point de vue, il n’est pas douteux que le projet nouveau améliore la situation du créancier, puisqu’il consacre quelques millions à un amortissement qui n’existe plus depuis longtemps.

Reste l’objection de forme ; celle-ci est plus importante. On voit d’abord figurer parmi les ressources de la nouvelle caisse une somme de 6 millions provenant des aliénations de forêts et des coupes extraordinaires de bois ; on peut craindre que ce ne soit un retour déguisé à ce projet d’aliénation des forêts qui avait été si mal vu l’année dernière par le corps législatif, et qu’on a dû retirer cette année devant les manifestations de l’opinion. On ne voit pas non plus que la diminution des charges soit aussi certaine qu’on le prétend. Ainsi, pour prendre la plus importante, celle de la garantie d’intérêt accordée aux compagnies de chemins de fer, oh-établit bien que cette garantie, après être restée stationnaire entre 35 et 40 millions pendant une dizaine d’années, est appelée à