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millions de rente qu’elle ne l’était, il y a douze ans, d’en payer 240 ou 100 millions de moins. Il n’en est pas moins vrai que le créancier de l’état, qui a prêté son argent à des cours bien supérieurs à ceux d’aujourd’hui, a le droit de se plaindre et de trouver qu’on lui a causé un préjudice en augmentant sensiblement la dette, sans rien faire pour la diminuer. Cette nécessité de l’amortissement après nos grands emprunts a été tellement sentie par tout le monde, qu’il n’est pour ainsi dire aucun rapport de la commission du budget depuis quelques années qui n’en ait exprimé le vœu formel. C’est ce qui faisait dire l’année dernière encore à M. Thiers : « Adoptez l’amortissement facultatif ou obligatoire, celui qui vous plaira, mais adoptez-en un. » Ce conseil a été enfin entendu, et le gouvernement se dispose à rétablir l’amortissement pour 1867 d’après un nouveau système qu’il soumet à la sanction du corps législatif. Voyons quel est ce système.

Il consiste à créer une caisse qui sera dotée, comme celle de 1816 et 1817, de certaines ressources qu’on détache du budget ordinaire et extraordinaire ; mais à la différence des précédentes, les revenus de cette caisse ne représentent pas une somme fixe, qui restera toujours la même : ils pourront s’accroître, et on impose des charges corrélatives qui, selon le projet, sont destinées à diminuer. On estime que pour 1867 la différence entre les revenus et les charges sera de 20 millions, en dehors d’une ressource provenant de l’aliénation des forêts, et c’est cette différence de 20 millions qu’on propose d’affecter à l’amortissement ; si plus tard elle est plus considérable, l’amortissement en profitera. Voici du reste l’économie du projet tel qu’il a été soumis au corps législatif.

On donné à la caisse comme nu-propriété les bois de l’état et les chemins de fer à la fin des concessions, et comme jouissance immédiate le produit des coupes ordinaires de bois, le produit de l’impôt du dixième sur le trafic des chemins de fer en grande vitesse, les sommes à provenir du partage des bénéfices avec les compagnies de chemins de fer, les bénéfices réalisés chaque année par la caisse des dépôts et consignations, les arrérages des rentes rachetées par la caisse d’amortissement et les excédans de recette du budget lorsqu’il y en aura. Par contre, on charge la caisse nouvelle du paiement des intérêts et de l’amortissement des obligations trentenaires, du paiement des intérêts, primes et amortissement des emprunts spéciaux pour le rachat des canaux et ponts, de l’avance à faire des sommes que l’état s’est engagé à payer aux compagnies de chemins de fer à titre de garantie d’intérêts. Les ressources immédiates de la caisse sont évaluées à 63 millions, et les charges à 43 millions, laissant ainsi l’excédant d’une vingtaine de millions