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les impériaux à notre grand préjudice et à celui des autres confédérés. Nous en avons été très émerveillés. Nous nous attendions à toute autre chose et nous ne croyions pas être abandonnés par sa sainteté dans un moment où elle était pourvue d’argent et où nous avions donné ordre de lui en remettre de nouveau, étant à la veille de conclure un arrangement avec le roi d’Angleterre et de donner ensemble tant d’affaires à l’empereur, qu’on pût l’amener à des conditions honnêtes. Il est étrange que sa sainteté veuille se remettre à la discrétion de l’empereur[1], qui en fera un simple prêtre plutôt que de persister dans l’amitié de princes si puissans et tout disposés pour sa défense et pour la libération de l’Italie. Je vous ai fait appeler, continua-t-il, pour me plaindre de cette conduite de sa sainteté. Je pense agir de telle sorte que l’empereur ne réussisse pas dans son dessein de tout soumettre à sa tyrannie, et je laisserai en servitude ceux qui y seront tombés par bassesse et par peur. Le pape nous ayant abandonnés, nous resserrerons nos liens, le roi d’Angleterre, la seigneurie de Venise et moi ; j’espère que Dieu nous aidera et que nous aurons assez de force pour venir à bout de l’empereur. »

Avant que Clément VII connût, par la dépêche du nonce Acciajuoli, cette véhémente sortie de François Ier contre l’acte auquel il avait eu la faiblesse de souscrire, il y avait déjà renoncé. Le jour même où il concluait cette trêve onéreuse et humiliante, les troupes pontificales remportaient une victoire marquée sur les troupes impériales dans le sud de l’Italie. Le général de l’église Vitelli et le cardinal-légat Trivulzi, à la tête d’une armée de 10,000 bons soldats, attaquaient devant Frosinone l’armée espagnole, qui en faisait le siège. Ils la battaient, la contraignaient d’évacuer les états de l’église et de rentrer assez en désordre dans le royaume de Naples. En apprenant ce succès, le pape enhardi rompait le traité du 31 janvier, auquel la peur seule l’avait disposé à consentir. Il prescrivait de continuer la guerre. Passant même d’un excès d’abandon à un excès d’entreprise, il voulait poursuivre la conquête du royaume de Naples, qu’il avait proposée par le secrétaire Sanga à François Ier pour un des fils du roi, qui épouserait Catherine de Médicis, sa nièce.


IV

La victoire de Frosinone, qu’il apprit presque aussitôt, causa autant de joie à François Ier que la trêve lui avait inspiré de mécontentement. Pensant bien que Clément VII rentrerait dans la

  1. « Che lo farà tornare un simplice prete. » Lettre d’Acciajuoli, du 17 février 1527. Négociations, etc., t. II, p. 62.