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L’homme qui doit mettre le feu à la charge se tient alors tout près dans une barque, où se trouve un réchaud chargé de morceaux de fer rouge. Il se dirige vers la partie saillante du tube, et, saisissant avec une paire de pinces un des brins de fer rouge, il le précipite dans l’intérieur. Ceci met naturellement le feu à la poudre et fait aussitôt sauter la roche. Une partie du tuyau se brise près de la cartouche, mais le reste (qu’on repêche au moyen d’une corde que l’allumeur, le lighter, a eu soin d’attacher d’avance) pourra servir une autre fois. Au moment de l’explosion, ceux qui se trouvent dans le bateau n’éprouvent aucun choc ; seulement l’eau monte avec violence vers la surface en bouillonnant. Les personnes qui se trouvent à terre ou sur les pointes de rochers ayant à la base quelque communication avec celui qu’on vient de faire sauter sentent au contraire une forte commotion, semblable à la secousse d’un tremblement de terre. Pour que de tels travaux puissent se pratiquer en toute sûreté, il faut nécessairement que les eaux aient une certaine profondeur, — au moins une douzaine de pieds ; — mais en général on opère dans des abîmes bien autrement considérables. On a souvent recours à ces sapes et à ces mines ingénieuses pour débarrasser les eaux des rochers ou des récifs qui entravent la navigation. Dans le Menai-Strait (défilé de Menai), entre Holyhead et l’île d’Anglesey s’élevaient jusqu’à ces derniers temps deux écueils menaçans, dont l’un était connu sous le nom de la Vache (Cow) et l’autre s’appelait le Veau (Calf). Ces masses rocheuses soulevant leur tête au-dessus des vagues étaient un danger pour les navires. En 1863, M. W.-B. Hicks, de Falmouth, accompagné d’autres plongeurs, se mit en devoir de faire sauter cet obstacle. L’ouvrage est sans doute aujourd’hui terminé ; les deux rochers ont disparu de la surface de la mer ; encore quelques années, et leur nom même sera peut-être effacé de la mémoire des navigateurs.

La cloche à plongeur est la contre-partie du ballon. Tandis que les aéronautes montent pour explorer les champs de l’air, le diver, lui, s’enfonce dans une autre atmosphère liquide ayant aussi ses lois, ses courans, ses climats, ses couches concentriques et soumises à différens degrés de température. L’invention de la diving-bell, cet aérostat des mers, a-t-elle vraiment profité à la science ? Jusqu’ici, la cloche n’a donné lieu, j’ai pu m’en convaincre, qu’à très peu d’observations précises. On a bien constaté l’état du pouls chez quelques-unes des personnes qui descendaient dans cet appareil ; mais la température de l’eau à la surface et aux diverses profondeurs, celle de l’air à l’intérieur de la chambre, mille autres remarques sur le fond de la mer n’ont été encore que très vaguement indiquées. Il y a là une lacune qu’il est peut-être bon de