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avancées, les engagemens trop nombreux, les préparatifs trop considérables pour qu’il pût reculer. D’ailleurs le désir de délivrer l’Italie des impériaux était dans l’esprit de Clément VII plus fort encore que ne l’était sur son âme le danger dont on le menaçait, et le dataire Giberto, si zélé pour la cause de l’indépendance italienne, n’eut pas de peine, en réveillant ses haines, qui étaient profondes, en invoquant son honneur, qui y était engagé, à le fortifier dans les résolutions qu’il avait naguère prises. Aussi dans une dernière audience Clément VII dit à Ugo de Moncada et au duc de Sessa que décidément, et après y avoir bien pensé, il ne trouvait aucun moyen de rompre ce qu’il avait conclu depuis si peu de temps, et que pour rien au monde il n’entacherait son honneur et ne manquerait à sa parole[1]. Les ambassadeurs de Charles-Quint se retirèrent en menaçant le souverain pontife. « Votre sainteté nous met ainsi la guerre entre les mains ; elle nous aura donc pour excusés, si nous prenons les armes pour la défense des états de l’empereur, puisqu’elle nous y contraint[2]. »

Ils écrivirent en même temps à Charles-Quint : « Le pape est votre ennemi déclaré, avec les rois d’Angleterre, de France et les Vénitiens. Tous ensemble ils sont résolus à s’opposer à la grandeur de votre majesté, à l’abaisser et à la réduire au point qu’elle leur soit égale[3]. » Ils ajoutaient que les choses étaient pour lui dans le plus fâcheux état en Italie, que les peuples lui étaient contraires, qu’il n’y avait que peu de troupes et point d’argent, que l’armée était sans chef, le royaume de Naples sans vice-roi ; qu’il devait remédier bien vite à tout cela, y faire passer de l’argent et des soldats, envoyer le duc de Bourbon en Lombardie et Lannoy à Naples ; qu’ils avaient informé le marquis del Guasto et Antonio de Leyva, qui commandaient à Milan depuis la mort de Pescara, de ce qui se passait à Rome, en les invitant à prendre toutes les précautions dans le Milanais ; qu’ils y traitaient avec le duc de Ferrare, dont ils exigeaient une somme considérable de ducats, en lui promettant la possession de Modène et la confirmation de Reggio, de Rubiera et de Ferrare ; qu’ils avaient demandé à l’archiduc Ferdinand de lever des lansquenets en Allemagne et de les faire descendre au plus vite en Italie. « Si cela s’exécute, disaient-ils en finissant, et si votre majesté envoie d’Espagne tout ce qu’elle pourra, surtout de

  1. « Que no hallava modo para poder romper lo que tan poco avia que tenia asentado y en esto por ninguna forma perjudicaria a su honzra y palabra. » Archives de Vienne.
  2. « Nos ha echado la guerra en las manos. Despedimos nos de su santitad suplicandole nos tuviese por escusados si tomavamos las armas contra el en deffession de los estados de V. M., pues somos forcados y tirados a ello. » Ibid.
  3. « Y que todos juntos son deliverados de obviar y abazar la grandeza de V. M. y reducirle in terminos que sea ygual a ellos. » Ibid.