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de l’empereur. Il devait promettre également au pape le rétablissement de Sforza à la condition que ce serait par voie de justice, afin que les apparences fussent sauvées et qu’il fût dégagé lui-même vis-à-vis du duc de Bourbon, à qui seraient payés, pour son entretien, 4,000 ducats par mois sur le duché de Milan[1]. Il devait aussi lui faire des ouvertures avantageuses touchant Reggio, Rubiera et Ferrare même, que réclamait Clément VII comme appartenant à l’église. Pour mieux induire le pape à s’accorder avec l’empereur, Moncada avait ordre de lui apprendre que le roi très chrétien, en proposant pour la rançon de ses enfans 2,000,000 d’écus d’or, offrait toujours d’accomplir le traité de Madrid en tout le reste, c’est-à-dire de livrer l’Italie à l’empereur. Charles-Quint voulait par là diviser les confédérés avant de les combattre, et il prescrivait à Ugo de Moncada de lui dépêcher un courrier qui lui apportât, en volant[2], la nouvelle de tout ce qu’il aurait fait à Rome. S’il ne pouvait pas persuader le pape par les offres qu’il était chargé de lui adresser, Moncada devait traiter avec le duc de Ferrare, s’entendre avec les Colonna[3], et recourir à un moyen à la fois perfide et violent qui, par la surprise et la force, détacherait Clément VII de la ligue.

Don Ugo se rendit d’abord à Milan. Il eut une conférence avec Francesco Sforza. Il ne put pas le décider à sortir de la citadelle où il s’était enfermé et à la remettre entre les mains du protonotaire Carraciolo, à qui serait confié, pour la forme, le jugement de son affaire. Sforza refusa même de s’entendre tout seul avec l’empereur en déclarant qu’il ne pouvait ni ne voulait se séparer des confédérés, qui lui venaient en aide. Ugo de Moncada ne fut pas plus heureux à Rome, où il courut après avoir quitté Milan. Il avait traversé Sienne, que sa rivalité avec Florence et la crainte qu’elle avait des Petrucci, dont Clément VII était l’appui, rendait favorable au parti impérial ; mais des Alpes à Rome « il avait passé, disait-il, entre les piques et les escopettes, au cri de meurent les

  1. Lettre de Charles-Quint à Ugo de Moncada, du 11 juin 1526. — Lanz, t. Ier, p. 213-216.
  2. « Dar nos aviso con correo volante de todo que hallaredes. » Ibid., p. 213.
  3. Page 216. Le cardinal Pompeio Colonna lui avait fait dire, par son envoyé à sa cour, « que el tenia buena disposicion para echar el papa de Roma e resolver Sena y aun Florencia y algunas tierras di la yglesia contra sua santidad. » Charles-Quint avait répondu au sollicitador : « Agradascicndo al dicho cardenal su amo su buena voluntad con muy buenas palabras que os (Moncada) havemos ambiado alla con amplissima poder para qualquier cosa que succediese in todo erento. » Si Ugo de Moncada ne parvenait pas à gagner le pape, l’empereur ajoutait : « Sera bien que no olvidais de prevenir antes que ser prevenido, y que platicays en secreto con el dicho cardenal Colonna, para que como de si mismo, ponga en obra lo que, como ariba, su sollicitador nos ha dicho, y que en ello le hagais dar todo favor secreto. » Ibid., p. 216.