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la présente déclaration avec tout ce qu’elle comporte dans le sens simple et ordinaire des mots, sans aucune évasion, équivoque, ni réserve mentale, quelle qu’elle soit. » M. Monsell demandait que cette formule blessante fût remplacée, comme pour les autres dissidens, par un simple serment de fidélité à la reine et aux lois, et la proposition, soutenue par le ministère, passa à la chambre des communes ; mais elle fut repoussée à la chambre des lords, où le discours d’ouverture de la session de 1866 annonce qu’elle sera représentée. Enfin M. Göschen à son tour proposa une motion qui, en dispensant les dissidens de l’obligation de signer l’acte de conformité aux articles de foi de l’église établie, leur eût permis d’aspirer à tous les grades de l’université d’Oxford. Le point important de la motion, c’est qu’en ouvrant aux dissidens la faculté de prendre les grades, elle leur ouvrirait aussi celle d’exercer les droits politiques qui appartiennent à l’université, de participer à son gouvernement et à l’administration des grands biens qu’elle possède, — toutes choses que l’église établie est habituée par une tradition séculaire à regarder comme les objets d’un monopole qui lui est dévolu sans contestation possible. Le projet, appuyé encore par le ministère et particulièrement par M. Gladstone, passa en seconde lecture à la majorité de 206 voix contre 190 ; mais c’était à la veille de la dissolution, et il ne put pas être porté à la chambre des lords. Il est plus que probable qu’il y eût été d’abord repoussé ; néanmoins il est certain que, comme la proposition relative au serment des catholiques, il finira par être converti en loi.

Tous ces témoignages de sincère libéralisme disposaient favorablement les esprits, et l’effet qu’ils allaient produire devait dépasser les prévisions. Quand on alla aux élections de 1865, les libéraux comptaient que, pertes et gains compensés, ils gagneraient sur les conservateurs environ 25 voix, qui, réunies à la majorité qu’ils possédaient déjà, leur donneraient approximativement un avantage de 60 voix dans tous les votes de partis. Le résultat aujourd’hui accepté, c’est qu’au lieu de 25 voix la majorité s’est renforcée d’environ 40 voix nouvelles qui lui assurent un avantage d’au moins 80 voix dans les circonstances importantes. Ce surcroît vient surtout de l’Irlande. Pendant les cinq premières années de la durée du parlement, on avait vu bon nombre de députés irlandais passer à l’opposition, irrités qu’ils étaient de la politique italienne du gouvernement et blessés par l’accueil fait à Garibaldi. Sur les 105 membres dont se compose la députation irlandaise, 73 avaient voté avec l’opposition pour la motion de censure présentée en 1864 par M. Disraeli, et l’on en avait conclu assez naturellement qu’il s’était déclaré en Irlande un courant d’opposition de plus en plus marqué contre le