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intrépidité, son audace et jusqu’à son honneur, la coalition qu’il avait déconcertée s’était renouée. Alberto Pio, comte de Carpi, et le comte Ludovic de Canossa, évêque de Bayeux, ambassadeurs de France, l’un à Rome et l’autre à Venise, avaient, au nom de la régente Louise de Savoie, excitée elle-même parle roi Henri VIII, ourdi avec le saint-siège et la sérénissime république une ligue franco-italienne pour soustraire la péninsule au joug des impériaux et la rétablir dans son indépendance[1]. Les articles en avaient été dressés en janvier 1526. Clément VII allait les signer lorsque le duc de Sessa, ambassadeur de Charles-Quint, et l’archevêque de Capoue, son zélé partisan à la cour de Rome, obtinrent du pape qu’il différât en lui promettant, de la part de l’empereur, qu’avant deux mois tout le duché de Milan serait mis entre les mains du duc Sforza après avoir été évacué par les lansquenets, qui retourneraient en Allemagne, et par les Espagnols, qui rentreraient dans le royaume de Naples ; mais avant le terme des deux mois le traité de Madrid était survenu, et l’empereur, se croyant assuré de François Ier et n’ayant plus à craindre l’Italie si elle ne s’unissait pas avec la France, n’avait rien fait de ce que son ambassadeur avait annoncé. Loin de retirer ses troupes de la Lombardie, il les avait employées à assiéger dans la citadelle de Milan Francesco Sforza, dont il avait donné le duché au duc de Bourbon.

Clément VII reprit alors le plan de confédération auparavant projeté entre les états italiens et la régente de France. De concert avec la seigneurie de Venise, non moins en crainte que lui de la puissance de Charles-Quint, disposant des forces de la république de Florence, soumise à son autorité, — assuré de l’assentiment du duc Francesco Sforza, toujours assiégé dans la citadelle de Milan, le pape se hâta de négocier avec François Ier une ligue protectrice de l’Italie. Conçue en apparence dans une pensée de paix universelle, cette ligue était en réalité dirigée contre Charles-Quint. « La république chrétienne, était-il dit dans le préambule du traité qui déterminait le but et les moyens de la confédération, est livrée depuis tant d’années à des guerres continuelles et en est à tel point bouleversée et affaiblie, que si Dieu ne met pas un terme à ces guerres cruelles et n’aide pas la république pacifiée à respirer un peu, elle est visiblement bien près de sa fin. Ce mortel danger est d’autant plus à craindre que d’une guerre ancienne sortent toujours des guerres nouvelles et qu’au moment où la matière de l’incendie semble consumée, la flamme reparait en s’accroissant encore ; ce que voyant et retournant dans son esprit notre très saint seigneur

  1. Mémoire du 5 janvier 1520 faict par monseigneur le chancelier et baillé du commandement de Madame à l’ambassadeur d’Angleterre, etc. — Archives de l’empire, sect. hist. J. 965, liasse 5, n° 12.